Sexisme et harcèlement : une plainte contre la direction de l'ENVA braque l'attention médiatique sur la profession
La plainte serait étayée de 128 pièces, principalement des attestations de collègues ou d'anciens collègues.
© Accountanz - Adobe
Société
Depuis plusieurs jours, la presse grand public se passionne pour un sujet qui retentit sur la profession : le dépôt d'une plainte à l'encontre de la direction de l'école d'Alfort pour des faits de harcèlement moral et de discrimination sexiste. Des enseignants sont également pointés du doigt. Si certains faits ont démarré avant l'époque du #Metoo, ils perdureraient selon l'enseignante qui est à l'origine du dépôt de plainte, notre consoeur Valérie Freiche.
Suite à un dépôt de plainte s'appuyant sur plusieurs témoignages dénonçant un climat toxique, le parquet de Créteil a ouvert une enquête préliminaire pour harcèlement moral et discrimination sexiste visant l'école nationale vétérinaire d'Alfort (ENVA). Son écho médiatique interpelle la profession.
La plainte pour harcèlement moral et discrimination sexiste a été déposée par une vétérinaire en poste au sein de l'établissement, Valérie Freiche, praticienne hospitalière en gastro-entérologie. Elle affirme (lire l'interview ici) avoir subi pendant des années « brimades, propos humiliants et vexations », notamment de la part du directeur de l'école depuis 9 ans, notre confrère Christophe Degueurce.
La plainte serait étayée de 128 pièces, principalement des attestations de collègues ou d'anciens collègues décrivant eux aussi un management brutal et une ambiance délétère.
De son côté, le Pr Degueurce (lire l'interview ici) « conteste les allégations et les insinuations qui y sont formulées » et « réaffirme (l') engagement constant (de l'ENVA) en faveur du bien-être et de la santé mentale de ses étudiants et de son personnel ».
Des enquêtes du ministère de tutelle
Plusieurs enseignantes et salariées dénoncent par ailleurs des faits de sexisme impliquant certains enseignants.
Connues des anciens Alforiens, certaines exactions dénoncées dans la plainte avaient tendance à l'époque à être banalisées. L'émergence de l'hashtag MeToo leur fait prendre une autre dimension.
Au total, le ministère de l'Agriculture reconnaît avoir été saisi à quatre reprises via sa cellule de lutte concernant l'ENVA. Dans trois cas, « il n'a pas été identifié d'éléments systémiques de violence, de harcèlement ni d'agissement sexiste », selon l'AFP.
Interrogée par La Dépêche Vétérinaire sur cette plainte, la DGER* du ministère de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, indique que « le ministère est engagé contre les faits de harcèlement et de violence. A chaque signalement, il procède à une enquête indépendante, qui dans les cas rapportés à l'ENVA n'ont pas confirmé les signalements et montré que la direction de l'ENVA avait mis en oeuvre toutes les diligences de protection ».
Suicide récent d'une interne
Plusieurs événements dramatiques ont déjà concerné l'établissement et notamment le suicide cette année d'une jeune vétérinaire de 24 ans la veille de la rentrée alors qu'elle devait débuter son internat. Il y a 3 ans, le professeur d'anesthésie Christophe Desbois avait mis fin à ses jours après avoir dénoncé une longue descente aux enfers et refusé de cautionner des dysfonctionnements : « ambiance invivable, interventions chirurgicales majeures sans antalgiques adaptés, cadavres évitables, personnes bafouant le respect humain comme animal », selon la cellule d'investigation de Radio France.
Ces deux suicides soulignent à quel point la profession vétérinaire est vulnérable face à ce risque, comme l'ont confirmé les travaux du professeur Didier Truchot (voir DV n° 1621, 1705 et 1766). Ils renforcent l'engagement collectif de la profession en faveur de la prévention. M.J. et M.L.
* DGER : Direction générale de l'enseignement et de la recherche.
>> LIRE AUSSI : « Les faits sont graves et durent depuis des dizaines d'années »
>> LIRE AUSSI : « L'ENVA s'en remet à la justice pour établir les faits dans leur intégralité »
>> LIRE AUSSI : Le SNVEL appelle à la lucidité, à l'écoute et à la responsabilité collective





