Voeux du SNVEL : tourner la page de la division

© Jacques Graf

Laurent PERRIN

Président du SNVEL*

Comme chaque année à cette période, chacune et chacun, de façon plus ou moins formelle, dresse le bilan de l'année écoulée et formule ses voeux pour celle à venir. Alors, ne dérogeant pas à la règle, en se retournant sur l'année 2023, force est de constater que le bilan ressemble à celui de l'année précédente. Nous sortions d'une période Covid où l'activité vétérinaire profitait de la valeur refuge qu'est l'animal de compagnie et commençait à se stabiliser après cette période de forte croissance pour nous tous.

Mais à chaque médaille son revers, cette période avait notamment mis en avant les difficultés à recruter des forces vives pour cette activité forte, confirmant les prédictions de l'analyse prospective réalisée conjointement avec tous les organismes professionnels quelques années auparavant. Une mise à jour de cette analyse sera réalisée dans les prochaines semaines, espérant confirmer le bruissement que certains ressentent en constatant une meilleure réponse aux annonces qu'ils proposent. Une bonne nouvelle à prévoir ? Espérons-le.

Cette période a également confirmé la tendance de certains de nos consoeurs et confrères à se tourner vers les animaux de compagnie, délaissant l'activité auprès des animaux de rente. Moins de 20 % d'entre nous exercent cette activité désormais et, faute de prise de conscience plus nette de la part de nos partenaires éleveurs qu'il existe bel et bien « des vétérinaires sans éleveurs », contrairement à ce qui nous est trop souvent martelé, le modèle tant vanté du partenariat public-privé au bénéfice de la santé publique vétérinaire grâce à un maillage territorial sans faille aura vécu : l'urgence, c'était hier ! 

Les élections au sein du plus grand syndicat agricole ont amené des changements d'interlocuteurs et la perte de quelques mois pour avancer sur un sujet essentiel au maintien de la présence vétérinaire en proximité des éleveurs : la réforme du suivi sanitaire permanent et de la prescription hors examen clinique réservée au vétérinaire traitant pour les « filières traditionnelles ». 

La réforme de la rémunération du mandat sanitaire est au milieu du gué, l'indispensable prise en compte de la baisse drastique du nombre d'actes, base du revenu, engendrée par les légitimes allègements de prophylaxies doit aboutir à la mise en place d'un nouveau modèle. 

L'attractivité de l'activité auprès des animaux de rente chute ainsi, confirmant la tendance évoquée plus haut, souffrant de la comparaison avec celle de l'activité auprès des animaux de compagnie, en particulier lorsque celle-ci devient majoritaire dans un établissement de soins...

L'année 2023 aura surtout été celle des réponses aux questions que nous nous posions tous sur la financiarisation de notre profession. Le Conseil d'Etat a confirmé, en début d'été, les radiations de 4 sociétés d'exercice vétérinaire prononcées par le Conseil de l'Ordre, apportant, bien au-delà de ces sociétés, des orientations fortes quant aux règles qui s'imposent à l'exercice vétérinaire.

Cette décision a ouvert la porte à la conciliation que le SNVEL appelait de ses voeux depuis les premières radiations. Les conclusions de cette conciliation, qui a eu lieu cette fin d'année sous l'égide du ministère, traduisent les conclusions du Conseil d'Etat en termes « partagés » afin qu'elles soient mises en oeuvre. 

Bon nombre des motifs mis en avant lors des procédures sont confortés : notamment, les vétérinaires exerçants doivent avoir le « contrôle effectif » de leur société d'exercice et chacun des établissements d'une société d'exercice vétérinaire doit être géré « au moins à temps partiel » par un associé de la société.

La traduction opérationnelle dans les sociétés concernées par ces procédures est en cours et, conscients de leur rôle, nos consoeurs et confrères, dont nous avons porté la voix lors des discussions, qui ont choisi ce mode d'exercice sont aujourd'hui pleinement impliqués. Nous continuerons à les accompagner, comme nous le faisons pour tous nos adhérents, pour aboutir à la mise en conformité de leurs sociétés

Cependant, l'ensemble des motifs de radiations n'ont pas été confirmés, ouvrant, là encore, le champ d'une réflexion professionnelle quant à la préservation de l'indépendance des vétérinaires face aux acteurs de l'amont et de l'aval de la profession. Cette réflexion sera menée dans les prochains mois avec toutes les parties prenantes.

La page de la division que nous avons vécue ces dernières années doit être tournée définitivement, dès lors que le droit sera respecté et que chacun aura trouvé la place qui lui est réservée. Nous partageons, en effet, avec l'ensemble des vétérinaires, quel que soit leur mode d'exercice, bon nombre de préoccupations professionnelles.

La plupart des sujets que nous avons à traiter sont souvent gérés au bénéfice de tous les vétérinaires et la segmentation de la représentation ne peut qu'être néfaste à une voix forte de la profession. Aussi, afin que chacun se sente encore mieux représenté, nous travaillerons, en 2024, à une structuration par laquelle nos consoeurs et confrères pourront participer et soulever des débats sur des thématiques qui leur sont propres : tous les modes d'exercice seront ainsi représentés et respectés au sein du SNVEL pour que l'assemblée générale soit le reflet des préoccupations de tous.

Espérant que ces quelques mots répondront à vos attentes, je me permets de vous adresser pour 2024 tous mes voeux de santé et réussite pour vous et vos proches mais aussi d'unité au bénéfice de la profession, des générations de vétérinaires à venir, dans le respect de chacune et chacun, pour un bonheur retrouvé d'être vétérinaire.

* SNVEL : Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1690

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