Traitement de la PIF : la révolution GS-441524

La PIF, maladie infectieuse provoquée par un coronavirus félin pathogène issu de la mutation interne d'un coronavirus entérique félin bénin, est une véritable problématique particulièrement chez les jeunes chats issus de collectivités avec une évolution toujours fatale en l'absence de traitement efficace.

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Maud LAFON

Infectiologie

La pharmacie Delpech commercialise depuis cet été une préparation magistrale de GS-441524, la forme active du remdesivir, seule molécule autorisée pour le traitement de la péritonite infectieuse féline (PIF) par le tout récent règlement d'exécution européen relatif aux antimicrobiens dont l'usage est interdit ou restreint dans le cadre d'une utilisation hors AMM. La mise sur le marché d'une telle pâte orale révolutionne l'approche de cette maladie quasi systématiquement mortelle chez les jeunes chats et chats âgés. Elle soulève aussi un certain nombre de questions quant à la délivrance du produit.

Finis les accompagnements illégaux, quand au moins ils étaient sollicités, et les approvisionnements via des groupes Facebook occultes : les vétérinaires ont désormais accès légalement au GS-441524, métabolite actif du remdesivir, seule molécule antivirale autorisée dans le traitement de la péritonite infectieuse féline (PIF) par le tout récent règlement d'exécution européen relatif aux antimicrobiens dont l'usage est interdit ou restreint dans le cadre d'une utilisation hors AMM (lire DV n° 1719).

Bien qu'il ne soit pas commercialisé sous le statut de médicament, le remdesivir est donc, enfin, disponible de façon légale en France, dans le cadre de la cascade et toujours hors AMM.

L'usage hors AMM du remdesivir dans une autre indication que la PIF est interdit.

La pharmacie Delpech, la seule pour le moment, propose, depuis cet été, une préparation magistrale de GS-441524 sous forme de pâte orale, galénique qui semble avoir fait ses preuves chez le chat et évite notamment la douleur, voire des lésions de nécrose cutanée au site d'injection, fréquemment rapportées avec les formes injectables.

La mise sur le marché d'un tel produit révolutionne l'approche de cette maladie quasi systématiquement mortelle chez les jeunes chats et les chats âgés et qui, jusqu'à présent, faisait surtout l'objet de traitements palliatifs.

Marché noir

Un véritable marché noir s'était constitué autour de ce produit qui est capable de les guérir.

La PIF, maladie infectieuse provoquée par un coronavirus félin pathogène (FIPV) issu de la mutation interne d'un coronavirus entérique félin bénin (FECV), est une véritable problématique particulièrement chez les jeunes chats issus de collectivités avec une évolution toujours fatale en l'absence de traitement efficace.

La préparation magistrale de GS-441524 est aujourd'hui la seule alternative thérapeutique enfin accessible légalement. Elle ne peut être délivrée que sur ordonnance. Les pharmacies peuvent la fournir directement aux propriétaires, s'ils sont munis d'une telle prescription, ou aux vétérinaires qui eux-mêmes la vendront à leurs clients. Les vétérinaires ne peuvent prescrire le produit que pour un animal donné et n'ont pas le droit de le stocker.

Faible durée de conservation

Notre consoeur Suzy Valentin, spécialiste en médecine interne à la clinique Hopia, a accompagné bénévolement la pharmacie Delpech dans la commercialisation de sa pâte orale de GS-441524. Cette dernière est présentée dans un stylo qui délivre la pâte selon un nombre de clics en fonction du poids de l'animal. Deux concentrations sont disponibles : 15 et 22,5 mg/kg, cette dernière étant préconisée pour les formes nerveuses et oculaires.

Suzy Valentin souligne la faible durée de conservation du produit (60 jours) qui limite son stockage. En moyenne, deux à trois stylos sont nécessaires pour le traitement complet d'un chat (84 jours).

Elle supervise actuellement une étude d'efficacité et de palatabilité de la pâte orale avec la pharmacie Delpech. L'objectif est de recruter 30 à 40 chats. Les vétérinaires intéressés pour y participer sont invités à l'indiquer lorsqu'ils passent commande du produit auprès de la pharmacie Delpech.

Cette étude a reçu l'aval du comité d'éthique d'Oniris.

Notre consoeur rappelle qu'actuellement en France, la pharmacie Delpech est la seule qui propose une préparation magistrale de GS-441524. Au Royaume-Uni et en Australie, la laboratoire Bova commercialise la molécule. Des préparations magistrales sont également disponibles dans d'autres pays (Suisse, Pays-Bas, Etats-Unis où la Food and Drug Administration a accordé une AMM à un médicament pour chat contenant ce principe actif sauf dans quelques Etats).

Bien que non titulaire d'une AMM, la préparation magistrale est soumise à un certain nombre de règles. Le vétérinaire peut sous-traiter sa réalisation à une officine, qui elle-même respecte les règles de bonnes pratiques de préparation, puis la détenir mais il ne peut pas la stocker, hormis pour l'administrer dans le cadre d'une consultation ou d'une hospitalisation.

Par ailleurs, il ne peut la délivrer qu'à un animal vu en consultation.

Etudes encourageantes

Même si l'arrivée de ce produit est encore trop récente pour un retour étayé de son efficacité et de ses éventuels effets indésirables, les premiers résultats enregistrés sont très encourageants et les demandes, déjà nombreuses.

Les études, dont une enquête conduite dans le cadre de sa thèse vétérinaire en 2021 par notre consoeur Juliette Sotin*, rapportent un taux de survie des chats traités avec le GS-441524 de 80 à 90 %.

Des précautions d'emploi existent et le traitement préventif avec le GS-441524 est par exemple totalement proscrit puisqu'une telle approche risquerait notamment de favoriser le développement de résistances et d'impacter la santé humaine. Il ne faut pas oublier que le remdesivir, dont il existe un médicament humain (Veklury ND), non accessible aux vétérinaires même dans le cadre de la cascade, est utilisé dans les formes sévères de Covid-19. Les antiviraux utilisés dans le traitement du sida risqueraient également de pâtir de l'émergence de résistances.

Suzy Valentin dénonce cette utilisation préventive qu'elle constate chez certains éleveurs de chats qui se fournissent en GS-441524 de manière illégale et l'administrent une fois par semaine à leurs chats. « Une telle administration préventive n'a aucun sens et est dangereuse en termes de santé publique », s'insurge-t-elle.

Coût élevé

Des bémols persistent quant au coût du produit, toujours élevé d'autant qu'il est associé à des durées de traitement longues (84 jours recommandés).

Néanmoins, la mise à disposition d'un traitement auquel sont forcément associés les vétérinaires, au moins en tant que prescripteur, est une bonne nouvelle pour la profession et pour les chats.

Encore plus d'infos !

Sur sa page FaceBook Dr Suzy Vet Internist, page de formation en médecine interne pour les vétérinaires, Suzy Valentin publie, entre autres, des posts sur la maladie, son diagnostic et l'usage du GS-441524.

* Thèse vétérinaire « Traitement de la péritonite infectieuse féline par les molécules antivirales GC376 et GS-441524 : état des lieux sur leur utilisation en dehors du cadre légal en France », Juliette Marie Louise Sotin, Oniris, 2021.

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Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1720

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