Santé humaine : le gouvernement rend possible le recours aux médicaments vétérinaires

Ces médicaments sont utilisés suivant des conditions particulières d'emploi pour un patient, au vu de son état clinique.

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Michel JEANNEY

Santé publique

Dans le contexte actuel d'épidémie de Covid-19, le gouvernement rend possible, en cas de besoin, le recours, en milieu hospitalier, à certains médicaments vétérinaires. Au 7 avril, seules deux spécialités à base de propofol étaient autorisées mais, dans le futur, l'ajout d'autres médicaments à la liste positive est fort possible.

Une grande première. Dans le contexte de crise sanitaire actuel, le gouvernement rend possible le recours à des médicaments vétérinaires inscrits sur une liste positive en milieu hospitalier. Un décret a été publié en ce sens, le 3 avril.

« En cas d'impossibilité d'approvisionnement en spécialités pharmaceutiques à usage humain, des médicaments à usage vétérinaire à même visée thérapeutique, bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché (...) de même substance active, de même dosage et de même voie d'administration, peuvent être prescrits, préparés, dispensés et administrés en milieu hospitalier », indique le décret.

« La liste de ces médicaments et leurs principes actifs, désignés par leur dénomination commune internationale (...) et leurs conditions de préparation et d'emploi sont fixés par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et publiés sur son site Internet », précise-t-il.

Pharmacovigilance

Ces médicaments sont utilisés suivant ces conditions particulières d'emploi pour un patient, au vu de son état clinique. Leur utilisation doit être inscrite dans le dossier médical du patient.

Les médicaments figurant sur cette liste peuvent être fournis et achetés par les collectivités publiques auprès des fabricants et distributeurs agréés.

« Le recueil d'informations concernant les effets indésirables et leur transmission à l'ANSM et au centre régional de pharmacovigilance territorialement compétent sont assurés par le professionnel de santé prenant en charge le patient dans le cadre des dispositions réglementaires en vigueur pour les médicaments à usage humain bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché », souligne le décret.

A ce stade (au 7 avril), les médicaments concernés sont uniquement ceux à base de propofol (deux spécialités concernées*). Selon le directeur de l'Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV), notre confrère Jean-Pierre Orand, « les médicaments à venir seront aussi des médicaments nécessaires en réanimation (autres anesthésiques, anti-inflammatoires mais aussi, peut-être, des antibiotiques) ».

Selon le décret, les approvisionnements peuvent se faire auprès des fabricants et exploitants de médicaments vétérinaires concernés mais aussi des distributeurs en gros.

« Toutefois, avec l'ANSM et les industriels, nous souhaitons que les achats se fassent uniquement auprès de l'industrie vétérinaire afin de conserver les stocks chez les distributeurs en gros de médicaments vétérinaires pour un usage en médecine vétérinaire, d'autant que les stocks disponibles pour la médecine humaine ne sont, hélas, pas très importants comparés au besoin réel », précise Jean-Pierre Orand.

Ne pas fournir de médicaments directement aux hôpitaux

« Nous avons communiqué à l'ANSM un certain nombre d'informations relatives aux données qualité des produits mais aussi à l'état des stocks disponibles prenant en compte un stock tampon réservé pour la médecine vétérinaire. Ces données peuvent évoluer selon la situation sanitaire ainsi que la liste des médicaments concernés », poursuit-il.

Dans un communiqué du 31 mars, l'ANMV, informée que d'assez nombreux vétérinaires avaient été sollicités en direct par des hôpitaux pour leur fournir des médicaments vétérinaires en vue de leur utilisation sur des patients, avait enjoint les vétérinaires à ne pas leur en fournir directement (lire DV n° 1523).

« Si vous êtes sollicité(e) en direct par les hôpitaux, il convient de leur demander de s'adresser à leur Agence régionale de santé qui est en contact avec la cellule de crise nationale chargée de répartir les besoins », avait ainsi précisé l'ANMV.

* Les deux spécialités concernées sont des injectables destinés au chien et au chat : Proposure 10 mg/kg ND (Axience) et Propovet Multidose 10 mg/kg ND (Zoetis).

Arnaud Deleu : « Nos entreprises sont volontaires pour contribuer au maximum des possibilités »

La Dépêche Vétérinaire : Comment le Syndicat de l'industrie du médicament et réactif vétérinaires (SIMV) accueille-t-il cette annonce du gouvernement d'autoriser le recours aux médicaments vétérinaires en cas de besoin dans le secteur humain ?

Arnaud Deleu, directeur des Affaires économiques et de la formation au SIMV : Les entreprises du médicament vétérinaire ont, dès le début de la crise sanitaire, contribué en produisant du gel hydro-alcoolique et en remettant des protections aux professionnels de santé et aux hôpitaux.

Le directeur général de l'Agence nationale du médicament vétérinaire (ANMV) a coordonné, avec l'ANSM*, le SIMV et les entreprises concernées, l'identification des molécules recherchées et des médicaments vétérinaires qui pourraient être utilisés.

Les entreprises fournissent toutes les informations permettant d'évaluer, pour chaque médicament, une éventuelle utilisation en humaine.

Nous saluons cette coordination et cette évaluation. Actuellement (au 7 avril, NDLR), seul le propofol est sur la liste.

Nous avons demandé que l'ANMV assure le pilotage de la coordination ANMV-ANSM-exploitants et SIMV pour permettre une mise à disposition dans les meilleures conditions.

D.V. : Pensez-vous que cela va aboutir à une hausse de la fabrication de certains médicaments ? Si oui, lesquels ?

A.D. : Nos entreprises sont volontaires pour participer à l'effort et contribuer au maximum des possibilités.

Toutefois, nous ne connaissons pas, à ce jour, la liste (définitive, NDLR) des médicaments concernés. Il conviendra d'évaluer notre capacité de production en fonction des disponibilités de matières premières et du fonctionnement de nos sites qui produisent à environ 65 % de leurs possibilités.

* ANSM : Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1524

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