OABA : « Sauver les animaux sans oublier les humains »

Association de protection des animaux de ferme, de l'élevage à l'abattage, l'OEuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs a fêté l'année dernière ses 60 ans d'existence. La moitié de ces administrateurs sont vétérinaires, dont son président, Manuel Mersch.

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Michel JEANNEY

Protection animale

Si les animaux demeurent la priorité de l'OEuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs, l'association de protection des animaux de ferme s'efforce de prendre aussi en compte la détresse humaine qui souvent se cache derrière les cas de maltraitance animale. Les témoignages se sont succédé à son assemblée générale pour illustrer cette réalité.

Les adhérents de l'OEuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs (OABA) ont retrouvé, le 8 octobre dernier, la salle Victor Hugo du Palais Bourbon, à Paris, accueillis par le député du Val-de-Marne Mathieu Lefèvre (majorité présidentielle), pour l'assemblée générale de l'association qui a fêté l'année dernière ses 60 ans d'existence.

C'était la première assemblée générale, en tant que président de l'OABA, pour notre confrère Manuel Mersch qui a succédé en 2021 à notre confrère Jean-Pierre Kieffer, lui-même président de l'OABA pendant 20 ans.

Hommage à Jean-Pierre Kieffer

Manuel Mersch a assuré que son action s'inscrirait dans la continuité de celle de son prédécesseur, décédé fin 2021 et auquel un hommage appuyé a été rendu par le vice-président, maître Alain Monod, suivi d'une minute de silence.

Une fois n'est pas coutume, l'assemblée générale s'est intéressée longuement à la détresse humaine souvent présente derrière les cas de maltraitance d'animaux qu'elle traite tout au long de l'année.

Si l'OABA, association de protection des animaux de ferme, de l'élevage à l'abattage, a pour priorité les animaux, comme l'a rappelé Manuel Mersch, ses dirigeants sont conscients que la maltraitance animale peut résulter de difficultés sociales qu'ils essayent de prendre en compte avec leurs partenaires, par le dialogue et l'accompagnement, jusqu'au moment ultime et de dernier recours du retrait des animaux.

Au travers de trois anecdotes, l'éleveur Max Josserand, adhérent de l'association, qui accompagne certaines de ses interventions, en a témoigné avec émotion. L'OABA « est la seule association qui prend en compte en même temps les humains et les animaux », se félicite-t-il.

Une minorité d'éleveurs maltraitants

« La maltraitance est un dossier qui prend du temps et coûte de l'argent », explique le directeur de l'OABA, Frédéric Freund. « Elle est souvent lié au malaise dans les campagnes. Notre rôle consiste à sauver les animaux sans oublier les humains », insiste-t-il, prenant pour exemple les actions dans son département de résidence, l'Allier, où les interventions des forces de l'ordre s'effectuent en présence du Samu.

« Ces interventions sont lourdes. Elles sont décidées en dernier recours », rappelle-t-il. « Grâce à la prise en compte de l'humain, il arrive que l'éleveur accepte de vendre ses animaux avant la confiscation. »

« Nous sommes dans le même combat pour les conditions d'élevage », témoigne l'éleveur Bruno Faucheron, invité à l'assemblée générale en tant que représentant des Chambres d'agriculture de France où il est en charge du bien-être animal. Il confirme que la maltraitance est le fait d'une minorité d'éleveurs, en général eux-mêmes en souffrance. « La profession agricole s'investit dans le volet préventif » assure-t-il, notamment au niveau local dans la détection précoce des éleveurs en difficulté économique et sociale.

Une affirmation en partie contredite par notre confrère Vincent Spony, chef du service SPAE à la DDCSPP* de l'Allier, qui déplore que la cellule opérationnelle de prévention de la maltraitance de son département, qui réunit les différents acteurs des filières, ne mène pas d'actions sur le terrain, ni même n'a défini de plan d'actions.

Il souhaiterait que l'interprofession s'implique davantage dans la détection et la prévention des cas de détresse humaine conduisant à la maltraitance animale. En attendant, c'est l'administration qui doit gérer les animaux en souffrance avec peu de moyens, regrette-t-il.

Rendre les prescriptions applicables

Les différents acteurs peuvent compter sur la Mutualité sociale agricole (MSA), très mobilisée sur la prévention du mal-être en milieu agricole, si l'on en croit l'intervention de Magalie Cayon, responsable de la prévention des risques professionnels au niveau national au sein de la MSA. « C'est le professionnel qui, par sa qualité de relation avec les animaux, peut développer le bien-être de ses animaux », souligne-t-elle. 

Elle insiste sur la nécessité que les nouvelles prescriptions imposées à l'élevage ne s'appliquent pas au détriment de la santé des professionnels. D'où l'intérêt de les faire évoluer pour qu'elles deviennent de « réelles ressources sur le terrain ».

« Notre objectif est de trouver des solutions. La loi doit être applicable », acquiesce le président de l'OABA.

* DDCSPP : Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations.

Gros Plan : Insensibilisation à l'abattage : un combat toujours d'actualité pour l'OABA qui intente deux recours

« Nous ne recevons aucune subvention des pouvoirs publics », a rappelé le président de l'OEuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs (OABA), notre confrère Manuel Mersch, lors de l'assemblée générale de l'OABA, le 8 octobre, à Paris.

Cette situation rend cette association de protection des animaux de ferme, dotée d'un budget de 1,5 million d'euros en 2021, totalement libre de ses actions.

Manuel Mersch a déploré une fois de plus les nombreux abattages sans étourdissement qui ont lieu dans notre pays, 62 % des abattoirs de boucherie pouvant déroger à l'obligation d'étourdissement. « On ne dispose cependant pas de chiffres officiels, l'administration ne collectant plus les données au prétexte d'un changement de système d'information », s'est étonné le président.

Campagne d'information

L'association a mené, en 2021, avec l'Alliance Anticorrida, une vaste campagne d'information auprès du public dénonçant le nombre d'abattages sans étourdissement dans notre pays.

Elle tient en outre à jour, sur son site Internet, une liste des abattoirs qui pratiquent systématiquement une insensibilisation par l'étourdissement (https://oaba.fr/boycotter-abattage-sans-etourdissement/), un combat cher aussi à la profession vétérinaire.

Déboutée cette année en Conseil d'État sur sa demande d'étiquetage obligatoire des viandes sur le mode d'abattage, l'OABA a décidé de porter le dossier devant la Cour européenne des droits de l'Homme.

Autre recours, l'association attaque à nouveau en Conseil d'État l'administration qui, dans une instruction technique de 2020, définit des modalités d'électronarcose chez les volailles en contradiction avec le droit européen. 

Le bio seule garantie

Cette action ne serait pas sans rapport avec l'absence de représentation de la Direction générale de l'alimentation cette année à l'assemblée générale, contrairement aux habitudes, a fait remarquer le directeur de l'OABA, Frédéric Freund.

Le directeur a en outre rappelé que désormais le label rouge Gros bovins ne représente plus l'assurance d'un abattage avec étourdissement, seul le label Bio offrant désormais (suite à un recours européen de l'OABA, lire DV n° 1589) cette garantie.

En 2021, l'association a par ailleurs procédé au sauvetage de 1 200 animaux maltraités. 440 sont aussi gardés à vie, sans exploitation ni abattoir, dans 40 fermes partenaires réparties sur tout le territoire. M.J.

Gros Plan : Danièle Kieffer élue au conseil d'administration

Comme tous les ans, l'OEuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs (OABA) a procédé à l'élection partielle de ses administrateurs, dont la moitié sont vétérinaires.

Le président de l'association, notre confrère Manuel Mersch, a ainsi été réélu, comme notre consoeur Bénédicte Iturria (secrétaire générale adjointe) et Eva Souplet, avocate au barreau de Paris.

Danièle Kieffer, l'épouse de notre confrère Jean-Pierre Kieffer, président de l'OABA pendant 20 ans, fait quant à elle son entrée au conseil d'administration de l'association après avoir travaillé au secrétariat pendant plusieurs années.

Rappelons que Danièle Kieffer est aussi présidente de l'Association française de la famille vétérinaire, qui vient en aide aux étudiants et aux familles de vétérinaires en difficulté.

Par ailleurs, notre confrère Michel Courat, qui assurait une partie des audits de protection animale en abattoirs pour l'OABA, en qualité de coordinateur des enquêteurs, a décidé d'arrêter son activité pour raisons personnelles. M.J.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1635

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