Marché des produits de santé animale : une année 2022 en recul, un premier semestre 2023 plus encourageant

Michel JEANNEY

Économie

Le marché des produits de santé animale en chiffre d'affaires chez les ayants droit du médicament vétérinaire enregistre une contre-performance en 2022, particulièrement marquée dans le secteur des animaux de rente, qui contraste avec le cru exceptionnel de 2021, selon les nouveaux chiffres de l'AIEMV*. Parmi les ayants droit, les vétérinaires souffrent un peu moins que les autres, affichant plutôt une stagnation. Le premier semestre 2023, dont les indicateurs ont été dévoilés en même temps, atteste cependant d'une nette reprise chez les animaux de compagnie et les équidés tandis que les animaux de rente redressent très timidement la tête.

Comme le laissaient prévoir les chiffres décevants du premier semestre 2022 publiés l'année dernière à la même époque par l'AIEMV*, l'année 2022 s'est soldée au final par un marché des produits de santé animale chez les ayants droit du médicament vétérinaire particulièrement en berne, qui contraste avec le cru exceptionnel de 2021 (lire DV n° 1636).

Le chiffre d'affaires 2022 hors petfood enregistre en effet un recul de - 1,76 % (contre + 5,87 % en 2021), dû à une descente aux enfers inédite du secteur des animaux de rente (- 8,09 %) alors que le marché des animaux de compagnie (hors petfood) toussote avec une performance de seulement + 2,42 % (contre + 10,30 % en 2021). Le secteur équin, lui, stagne avec - 0,06 %.

Ces données sont d'autant plus négatives que l'inflation en 2022 s'est élevée à... + 6 % (Insee, ensemble des ménages hors tabac).

Descente aux enfers historique des animaux de rente

Heureusement, l'AIEMV dévoile, dans le même temps, des chiffres pour le premier semestre 2023 autrement plus rassurants, attestant d'une nette reprise chez les animaux de compagnie et d'une stagnation contenue, assez usuelle désormais, chez les animaux de rente (lire ci-après).

En 2022, le petfood (seul) se distingue par une croissance nettement positive avec + 7,41 % mais l'AIEMV précise que cette donnée « est à prendre avec précaution en raison de la modification du périmètre (...) par rapport aux années précédentes ». Ne nous y attardons donc pas.

La descente aux enfers du secteur des animaux de rente cache quelques disparités. La filière Ruminants limite les dégâts avec un recul de « seulement » - 4,61 %. Ce sont les filières Porcins et Volailles qui souffrent particulièrement avec une récession respective de - 14,20 % et - 17,24 % !

De tels mauvais chiffres sont rares et probablement historiques (l'inflation et le recul de la consommation alimentaire expliquent sans doute en partie ce résultat).

Toutes les classes thérapeutiques en souffrance

Les disparités entre secteurs des animaux de compagnie et des animaux de rente accentuent la domination du premier, qui franchit en 2022, pour la première fois sans le petfood, la barre des 50 % en termes de part de marché. Auparavant, il était dominant mais en incluant le petfood, les animaux de rente étant passés, dans ces conditions de périmètre, sous la barre symbolique des 50 % en 2010.

Hors le petfood, toutes les classes thérapeutiques sont en souffrance en 2022 à l'exception de celle intitulée « Autres classes » (qui inclut notamment les diagnostics et réactifs sauf matériel, les anti-inflammatoires sauf usages topiques et applications locales, les hormones, les antiseptiques...), qui progresse de + 3,03 %.

Les vaccins affichent le plus mauvais score avec - 7,15 %. Les anti-infectieux ne cessent de reculer d'année en année (- 5,96 % en 2022), ce qui, en soi, constitue une bonne nouvelle pour la lutte contre l'antibiorésistance.

L'innovation était au rendez-vous

L'innovation était pourtant au rendez-vous en 2022 puisque 82 nouveaux produits et 270 nouvelles présentations ont été lancées, des chiffres en hausse par rapport à 2021 (respectivement 79 et 253). Parmi les nouvelles présentations, 37 sont destinées aux animaux de rente, 216 aux animaux de compagnie (dont 165 liées au petfood), 10 aux équidés et 7 relèvent de la catégorie « Toutes espèces ».

Parmi les ayants droit du médicament vétérinaire, les vétérinaires confortent encore leur part de marché, qui passe de 79,50 % en 2021 à 80,29 % en 2022, au détriment de tous les autres ayants droit (pharmaciens, « Activité industrielle, groupements, autres » et « DSV, LDV, administration »).

Tous les ayants droit souffrent du recul général du marché des produits de santé animale en 2022 mais les vétérinaires un peu moins que les autres. Alors que le recul général est, rappelons-le, de - 1,76 %, chez les vétérinaires, il faut plutôt parler de stagnation avec - 0,76 %.

Le marché total en 2022 est estimé à 1 573 millions d'euros (base AIEMV). Les cinq premiers laboratoires (sur 16 au total) font 68,5 % (en légère progression par rapport à 2021) du marché des produits de santé animale à fin 2022 (petfood compris) et les dix premiers, 95 % (en progression de 5 points). ■

* L'Association interprofessionnelle d'étude du médicament vétérinaire (AIEMV) réalise des statistiques et des études sur les ventes de produits commercialisés par les ayants droit adhérents : laboratoires et distributeurs. Les produits pris en compte sont les médicaments vétérinaires (produits soumis à AMM) et les produits de santé animale hors AMM (= produits d'hygiène, suppléments nutritionnels, aliments animaux de compagnie, parapharmacie vétérinaire...). Les quantités commercialisées (y compris les produits gratuits) dans le circuit des ayants droit du médicament vétérinaire sont déclarées à l'AIEMV puis valorisées selon un tarif conventionnel. Les chiffres obtenus ne reflètent pas les chiffres d'affaires réels mais fournissent une très bonne indication des quantités consommées, des tendances et des évolutions du marché France (DOM- TOM compris). Les statistiques de l'AIEMV reprennent les ventes de ses adhérents et ne sont donc pas exhaustives. Il s'agit des statistiques d'achats des ayants droit qui ne présagent pas des délivrances aux utilisateurs.

Gros Plan : Premier semestre 2023 : nette reprise dans le secteur des animaux de compagnie et des équins

Si l'année 2022 s'est soldée par un marché des produits de santé animale chez les ayants droit du médicament vétérinaire en recul, 2023 s'annonce sous de meilleurs auspices, si l'on croit les chiffres du premier semestre dévoilés en même temps que ceux de l'année dernière par l'AIEMV*.

La croissance en chiffre d'affaires par rapport au premier semestre 2022 s'affiche ainsi à + 5,08 % hors petfood.

Cette bonne performance est liée au secteur des animaux de compagnie (+ 7,42 % hors petfood) et à celui des équidés (+ 7,47 %), tous deux affichant des progressions supérieures à l'inflation (inférieure à + 5/6 % pendant cette période).

Les animaux de rente se redressent légèrement

Après une nette récession en 2022, les animaux de rente redressent timidement la tête au premier semestre 2023 avec + 0,83 %, du fait d'une nette progression de la filière volailles (+ 6,14 %), d'une « stagnation positive » (+ 0,83 %) de la filière Ruminants, tandis que la filière Porcins reste en recul (- 3,11 %).

Toutes les classes thérapeutiques progressent pendant cette même période, particulièrement les endectocides (+ 9,59 %), les insecticides/ectoparasiticides (+ 8,05 %), la catégorie « Autres classes » (+ 5,88 %) et, dans une moindre mesure, les vaccins (+ 4,42 %).

Parmi les ayants droit du médicament vétérinaire, les pharmaciens affichent une croissance très au- dessus de la moyenne (+ 9,05 %), les vétérinaires sont à peu près dans la moyenne (+ 5,84 %), tandis que le chiffre d'affaires de la catégorie « Activité industrielle, groupements, autres » recule légèrement (- 1,13 %) et celui de la catégorie « DSV, LDV, administration » (dont la part de marché est dérisoire), nettement (- 10,95 %). M.J.

*AIEMV : Association interprofessionnelle d'étude du médicament vétérinaire.