Covid-19 : point sur le risque zoonotique après la découverte d'un cas chez un chat

C'est surtout la personne symptomatique qui sera un risque pour ses proches par comparaison avec l'animal de compagnie.

© Jeanne Brugère-Picoux

Jeanne BRUGÈRE-PICOUX

Membre de l'Académie vétérinaire de France et de l'Académie nationale de médecine

Santé publique

L'annonce, le 27 mars, d'un nouvel animal de compagnie positif au Covid-19, un chat résidant en Belgique et vivant dans l'entourage d'une femme touchée par le Sars-CoV-2, repose la question du risque potentiel de transmission du virus entre l'animal de compagnie et l'Homme. Les trois cas dépistés jusqu'à présent ne permettent pas, actuellement, de conclure à une infection productive favorisant une éventuelle contagiosité animal-Homme ou animal-animal. Ils ne remettent pas en question les recommandations déjà formulées quand un animal vit dans l'entourage d'un malade.

Nous avions déjà signalé (lire ici) qu'il était fort peu probable que l'agent du Covid-19, le Sars-CoV-2, soit transmissible de l'animal vers l'Homme alors que l'observation de deux chiens positifs à Hong Kong témoignait de la possibilité d'une contamination d'un propriétaire infecté vers son animal.

L'annonce, le 27 mars, de la contamination d'un chat en Belgique témoigne une fois de plus de cette possibilité de transmission du virus de l'Homme lors d'un contact étroit avec l'animal.

Mais peut-on parler de risque zoonotique de l'animal vers l'Homme face à ces cas exceptionnels ?

Le premier chien de Hong-Kong était un Loulou de Poméranie âgé (17 ans), mis en quarantaine le 26 février et sans signes cliniques.

Les prélèvements nasaux et oraux se sont révélés faiblement positifs pour la recherche de l'ARN viral par RT-PCR à 5 reprises puis les derniers prélèvements se sont révélés négatifs.

Les prélèvements rectaux ont été négatifs.

Mort à son retour de quarantaine

Ce chien est mort deux jours après son retour de quarantaine chez sa propriétaire, le 16 mars, à la suite de déficiences rénales et cardiaques. Et ce n'est qu'après ce décès, le 26 mars, que l'on a appris que la recherche d'anticorps sur un prélèvement sanguin, du 3 mars, s'était révélée finalement positive.

Du fait des faibles valeurs de PCR, on peut penser que l'infection développée par le chien a été trop faiblement productive pour attester d'un risque de contagiosité.

Le second chien positif de Hong-Kong est un berger allemand âgé de 2 ans envoyé en quarantaine depuis le 18 mars 2020 avec un chien négatif de race mixte de la même résidence*. Comme le cas précédent, il a été contaminé par son propriétaire et révélé positif lors de la recherche de l'ARN viral en RT-PCR, les 19 et 20 mars, mais sans présenter de symptômes.

Les données concernant ce deuxième cas ne permettent pas de conclure à une infection productive.

Présence de symptômes

Le troisième cas concerne un chat belge diagnostiqué positif à la faculté de médecine vétérinaire de l'université de Liège, le 18 mars.

Ce cas a été annoncé, le 27 mars, par le Comité scientifique (SciCom) institué auprès de l'Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire (Afsca), qui a d'ailleurs émis un avis provisoire sur le risque zoonotique associé aux animaux de compagnie**.

Le chat vivait chez sa propriétaire atteinte du Covid-19 après un voyage en Italie et confinée à son domicile. Il a présenté des symptômes (anorexie, diarrhée, vomissements, toux et respiration superficielle) une semaine après le retour de sa propriétaire.

Les prélèvements de liquides gastriques et de matières fécales se sont révélés positifs en PCR. Dix jours plus tard, l'état du chat s'est amélioré mais d'autres examens n'ont pu être réalisés du fait du confinement du chat et de la propriétaire.

Selon le SciCom, il n'est pas possible de conclure à une infection virale productive mais elle peut être suspectée du fait des symptômes compatibles avec une coronavirose. Mais le chat peut aussi avoir été un vecteur passif du fait de la forte contamination de l'environnement liée à sa propriétaire infectée et confinée.

4 000 échantillons

Ces trois cas ne permettent pas, actuellement, de conclure à une infection productive favorisant une éventuelle contagiosité animal-Homme ou animal-animal.

Par ailleurs, les laboratoires Idexx*** ont mis au point récemment un test de diagnostic Idexx Sars-Cov-2 (Covid-19) RealPCR test ND.

Ce test à été réalisé sur près de 4 000 échantillons respiratoires (77 %) ou fécaux (23 %), récoltés entre le 24 février et le 12 mars 2020 dans 50 états américains et en Corée du Sud où il existait des cas humains de Covid-19.

Plusieurs animaux de compagnie ont été testés : chiens (55 %), chats (41 %) et chevaux (4 %). Tous les tests se sont révélés négatifs.

Une étude sur une plus large échelle dans d'autres pays très affectés est nécessaire pour confirmer que le Sars-CoV-2 ne circule pas chez nos animaux de compagnie pendant une période d'épidémie importante.

Mesures de biosécurité

Le troisième cas chez un chat européen ne modifie pas les recommandations que nous avions formulées dans le dernier article (DV n° 1522). Il n'est pas nécessaire de séparer les animaux de la famille lorsqu'une personne est Covid-19 positive dans le milieu familial mais il faut renforcer les mesures de biosécurité habituellement recommandées pour éviter les zoonoses liées aux animaux de compagnie, notamment le lavage des mains, l'entretien de la litière ou l'apport des aliments tout en évitant un contact à risque avec l'animal (baisers, léchage notamment).

Il ne faut pas oublier que c'est la personne symptomatique qui sera surtout un risque pour ses proches par comparaison avec l'animal de compagnie, en contaminant fortement son environnement.

Par conséquent, l'important est, lorsque la personne infectée est maintenue à domicile, de réduire au maximum les possibilités de contacts de l'animal avec celle-ci et de désinfecter son environnement. Il faut aussi recommander qu'une autre personne vivant sous le même toit s'occupe de l'animal.

Réalisation de tests par les laboratoires vétérinaires

La réalisation de tests Covid-19 par les laboratoires vétérinaires est fortement souhaitable.

Dans le contexte exceptionnel de la crise sanitaire liée à la pandémie actuelle due au Covid-19, ces tests doivent être effectués en priorité pour le suivi des cas humains en France comme dans d'autres pays européens (lire aussi l'article sur le communiqué de l'Académie vétérinaire de France sur les tests Covid-19 du 28 mars) mais il faut aussi souhaiter la possibilité d'une vigilance vétérinaire accrue du risque de contamination des animaux de compagnie, voire de ferme, par le Sars-CoV-2 dans le contexte « Une seule santé » .

* Ce cas a fait l'objet d'une alerte sanitaire de l'OIE, le 23 mars.

** https://urlz.fr/cfa1.

*** https://urlz.fr/cfa7.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1523

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