Abattage rituel : imposer l'étourdissement préalable n'est pas contraire au droit, conclut la Cour de justice de l'Union

L'affaire fait suite à un décret de la région flamande (en Belgique) du 7 juillet 2017, qui a pour effet d'interdire l'abattage d'animaux sans étourdissement, y compris pour les abattages prescrits par un rite religieux.

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Michel JEANNEY

Société

Se prononçant sur un décret de la région flamande, en Belgique, imposant un étourdissement préalable même dans le cadre de l'abattage rituel, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé que le texte ne méconnaît pas les droits des croyants juifs et musulmans.

La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a tranché dans un arrêt du 17 décembre. Dans le cadre de l'abattage rituel, les États membres peuvent, sans méconnaître les droits fondamentaux consacrés par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, imposer un procédé d'étourdissement préalable, estime-t-elle.

L'affaire fait suite à un décret de la région flamande (en Belgique) du 7 juillet 2017, qui a pour effet d'interdire l'abattage d'animaux sans étourdissement, y compris pour les abattages prescrits par un rite religieux.

Saisine de la Cour constitutionnelle belge

Dans le cadre de l'abattage rituel, il prévoit en effet l'utilisation d'un « étourdissement réversible et insusceptible d'entraîner la mort de l'animal ».

Ce texte a notamment été contesté par plusieurs associations juives et musulmanes, demandant son annulation totale ou partielle. Selon elles, en ne permettant pas aux croyants juifs et musulmans de se procurer de la viande provenant d'animaux abattus conformément à leurs préceptes religieux, lesquels s'opposent à la technique de l'étourdissement réversible, le décret méconnaît le règlement n° 1099/2009 (sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort) et, partant, empêche les croyants de pratiquer leur religion.

C'est dans ce contexte que le Grondwettelijk Hof (Cour constitutionnelle en Belgique) a décidé de saisir la CJUE à titre préjudiciel.

La CJUE constate que le règlement n° 1099/ 2009 ne procède pas lui-même à la conciliation entre le bien-être des animaux et la liberté de manifester sa religion mais se borne à encadrer la conciliation qu'il incombe aux États membres d'effectuer entre ces deux valeurs.

Il s'ensuit, selon elle, qu'il ne s'oppose pas à ce que les États membres imposent une obligation d'étourdissement préalable à la mise à mort des animaux qui s'applique également dans le cadre d'un abattage prescrit par des rites religieux, pour autant, toutefois, que les États membres respectent les droits fondamentaux consacrés par la Charte des droits fondamentaux.

Dans le cadre de l'examen de la proportionnalité de la limitation, la Cour conclut que les mesures du décret flamand permettent d'assurer un juste équilibre entre l'importance attachée au bien-être animal et la liberté des croyants juifs et musulmans de manifester leur religion.

Pas d'entrave à la circulation de produits conformes aux préceptes religieux

Elle relève notamment que le décret n'interdit, ni n'entrave, la mise en circulation de produits d'origine animale provenant d'animaux qui ont été abattus rituellement lorsque ces produits sont originaires d'un autre État membre ou d'un État tiers.

En conséquence, la CJUE juge que le règlement n° 1099/2009 ne s'oppose pas à une réglementation telle que celle prévue par le décret flamand.

A noter que la CJUE, par cet arrêt, ne suit pas les conclusions de son avocat général Gerard Hogan qui avait estimé, le 10 septembre dernier, que la dérogation prescrite en faveur des rites religieux devait être respectée (lire DV n° 1541).

Le comité de coordination des organisations juives de Belgique, qui contestait le décret flamand, a, dans un communiqué, déploré la décision de la CJUE tandis qu'en France, la Fondation Brigitte Bardot, s'en est félicité, jugeant que les conclusions de l'avocat général étaient « une scandaleuse régression, en décalage avec la prise en compte du bien-être animal ».

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1555

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