Une pancytopénie féline d'origine inconnue sévit au Royaume-Uni

Épidémiologie

Plus de cinq cents chats ont été traités par des vétérinaires au Royaume-Uni pour une pancytopénie d'origine inconnue depuis février. La consommation d'aliments contaminés par des mycotoxines est suspectée d'être à l'origine de la maladie après que les autres causes connues de pancytopénie ont été exclues. Le Royal Veterinary College précise la conduite à tenir devant un chat présentant des symptômes de pancytopénie et incite les praticiens à déclarer les cas.

Le Royal Veterinary College (RVC) a confirmé, le 16 août, avoir recensé 555 chats traités dans ses hôpitaux et chez des vétérinaires du Royaume-Uni pour une pancytopénie d'origine inconnue caractérisée par un taux de mortalité de 63 % à cette date. Il précise que ces données ne représentent probablement qu'un petit pourcentage de cas car de nombreux chats n'ont pas été présentés dans une clinique et/ou fait l'objet d'une investigation par un vétérinaire et que seul un faible nombre de vétérinaires rapportent les cas au RVC.

Le RVC poursuit son travail sur la soudaine augmentation des cas de pancytopénie chez les chats du Royaume-Uni. « Les investigations sur la cause de cette affection ne suggèrent aucun lien avec des maladies infectieuses félines connues, des toxines (métaux lourds, oestrogènes) ou des carences/excès en vitamines ou minéraux », précise-t-il.

Plusieurs marques d'aliments préparés consommés par les chats atteints retiennent l'attention et ont fait l'objet de rappels. Les résultats des analyses pratiquées par le RVC sur ces aliments ont été partagés avec la Food Standards Agency.

Analyses d'aliments en cours

Le RVC poursuit ses analyses d'aliments consommés par des chats affectés ou non par la maladie pour déterminer la signification des résultats. Il encourage les vétérinaires recevant des chats présentant une thrombocytopénie et/ou une neutropénie grave inexpliquée avec ou sans anémie à remplir son questionnaire (https://rvc.onlinesurveys.ac.uk/pancytopenia).

Les signes cliniques peuvent être peu spécifiques au début (léthargie, malaise, anorexie). Les premiers signes spécifiques sont : saignement (de la gueule par exemple), hématochézie, hématurie, hématémèse, méléna, hématome post-prise de sang. Dans les cas graves, les chats peuvent présenter un collapsus avec hypovolémie.

Certains chats ont consulté sans signes cliniques et n'ont reçu un diagnostic que parce qu'un autre chat du foyer était atteint.

Le diagnostic de ce syndrome repose sur une numération sanguine complète (idéalement pratiquée dans un laboratoire externe). Les chats peuvent présenter une pancytopénie affectant les plaquettes, une neutropénie et une anémie non régénérative (selon la présence et l'importance des saignements).

Transfusion, antibiotiques, stimulation des granulocytes

Dans les stades précoces de la maladie et en particulier chez les très jeunes chats, des signes d'anémie régénérative peuvent être présents.

La pancytopénie est provoquée par une hypoplasie ou aplasie médullaire grave généralisée. La méthode diagnostique de référence repose sur l'analyse d'une ponction de moelle osseuse.

« Le traitement idéal des patients est inconnu. Nous suspectons une cause toxique de la maladie (bien que cela n'ait pas été confirmé) mais la toxine et son antidote sont inconnus à ce jour. Le traitement est donc basé sur des soins de soutien », indique le RVC. Les chats ne doivent plus consommer les aliments ayant fait l'objet d'un rappel.

Chez les patients anémiques instables, une transfusion de sang entier ou de globules rouges (avec ou sans plasma) est recommandée. Des antibiotiques à large spectre (amoxycilline) sont recommandés pour les chats avec un faible nombre de neutrophiles. La corticothérapie est controversée.

Surveiller la numération formule

D'autres thérapeutiques possibles existent - facteur de stimulation des granulocytes (G-CSF), acide tranexamique chez les patients présentant d'importantes hémorragies, cobalamine, folate et vitamine E - bien qu'aucune ne bénéficie de preuve scientifique.

De nombreux chats apparemment en bonne santé ont consommé les aliments suspects. Selon la motivation et les moyens du propriétaire, il lui est recommandé de surveiller son chat et de contacter son vétérinaire s'il remarque un des signes cliniques décrits. Une numération formule sanguine peut permettre d'identifier un cas chez un chat asymptomatique, surtout dans un foyer où un autre chat a été affecté.

Si la numération formule montre une diminution légère des plaquettes, des neutrophiles et/ou des globules rouges, il est recommandé de la répéter 3 à 14 jours plus tard en fonction de la gravité des symptômes. V.D.

Gros Plan : Les chats sont très sensibles aux mycotoxines

Des mycotoxines présentes dans des aliments du commerce pourraient être à l'origine des nombreux cas de pancytopénie observés chez les chats depuis février au Royaume-Uni. Le Royal Veterinary College rappelle les effets de ces toxines.

Les mycotoxines sont des composés toxiques produits par différents types de champignons. Elles peuvent pousser sur différentes cultures (graines et légumes) avant ou après la récolte et des aliments comme les céréales, noix, épices, fruits secs, le jus de pomme et le café, souvent dans des conditions chaudes et humides.

Les Trichothécènes sont une grande famille de mycotoxines produites par Fusarium, Trichoderma, Trichothecium... Les trichothécènes de type A contiennent les toxines T-2 et HT-2.

Pas de seuil légal dans les aliments pour chats

Les toxines T-2 et HT-2 ont de nombreux effets toxiques chez les animaux. Elles provoquent une perte de poids, d'appétit et une diminution des concentrations en cellules sanguines (cellules blanches, rouges et plaquettes), ce qui augmente le risque d'infections et/ou de saignements.

L'Agence européenne de sécurité alimentaire indique que les chats sont particulièrement sensibles aux mycotoxines T-2 et HT-2 mais les données manquent pour fixer une concentration légale en T-2/HT-2 dans les aliments pour chats.

Dans certains pays, une limite légale a été fixée dans les aliments de certaines espèces pour ces mycotoxines. V.D.