Une lettre ouverte du SNVEL aux vétérinaires dans le contexte tendu de lutte contre la DNC
Samedi 26 Juillet 2025 Vie de la profession 53634Depuis toujours, les vétérinaires ont répondu présents face aux maladies animales, rappelle David Quint.
© Jacques Graf
Dans un contexte tendu sur le terrain pour les vétérinaires impliqués dans la lutte contre la dermatose nodulaire contagieuse (DNC), le président du Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral (SNVEL), David Quint, s'adresse à ses consoeurs et confrères dans une lettre ouverte que nous reproduisons intégralement ci-après, les remerciant pour leur action basée sur la science dans l'intérêt de toute une filière.
« Chères consoeurs, chers confrères,
C'est en tant que président du SNVEL, syndicat qui vous représente toutes et tous, quels que soient vos modes d'exercice que je tenais à m'adresser directement à vous en cette période difficile. La crise sanit aire liée à la dermatose nodulaire contagieuse bovine (DNCB) secoue notre profession dans sa chair, et c'est avec humilité et reconnaissance que je vous exprime mon admiration pour l'engagement dont vous faites preuve.
Depuis toujours, les vétérinaires ont répondu présents face aux maladies animales. Aujourd'hui encore, malgré la douleur et la pression, vous êtes là : sur le terrain, aux côtés des éleveurs, pour mettre en oeuvre des mesures sanitaires lourdes mais nécessaires - vaccination d'urgence, surveillance, et oui, parfois l'abattage intégral des cheptels infectés. Ce sont des actes durs. Mais ils sont p ortés avec courage par des professionnels formés, compétents, profondément humains.
Nous assumons ces responsabilités parce que nous sommes des scientifiques. Et si nous avons choisi ce métier, c'est aussi parce que nous savons ce qu'est le devoir. La stratégie actuelle n'est pas le fruit d'un excès de zèle bureaucratique : elle s'appuie sur des fondements scientifiques solides et a été validée collectivement par l'ensemble des acteurs sanitaires lors du CNOPSAV du 16 juillet. Il ne s'agit pas d'un choix par défaut, mais d'une stratégie de rupture face à un virus classé en catégorie A, hautem ent contagieux, qui menace l'ensemble du cheptel national.
Contrairement à certaines affirmations publiques, les bovins abattus dans les foyers ne sont pas des « animaux sains ». Ce sont des animaux potentiellement infectés, silencieusement porteurs, au coeur même de la stratégie virale. L'expérience israélienne est là pour nous rappeler que l'abattage limité ne suffit pas : les résurgences y ont été régulières et massives. Comme le rappelle le Dr Éric Cardinale : « On n'éteint pas un incendie avec de l'eau tiède ». Tant que le virus circule, même de manière invisible, il men ace toute notre filière.
Ce combat sanitaire n'est pas seulement le nôtre. Il est celui de toute une chaîne : les éleveurs, les agents de l'État, les techniciens, et vous, vétérinaires ruraux comme canins. Car même ceux qui ne sont pas directement au contact de la DNCB ressentent aujourd'hui l'impact des tensions sociales, du doute ambiant, et de la stigmatisation. J'ai une pensée particulière pour les vétérinaires confrontés à la violence, au harcèlement, aux campagnes de désinformation, parfois au péril de leur intégrité physique ou morale.
Dans ce contexte, il est impératif que nous restions unis. L'unité, c'est ce qui nous protège. L'unité, c'est ce qui donne de la force à notre parole et de la clarté à notre action. Le SNVEL n'a de cesse de le rappeler : il y aura un temps pour l'évaluation des stratégies sanitaires mises en oeuvre, pour les discussions techniques et les débats d'orientation. Mais ce temps n'est pas encore venu. Aujourd'hui, nous devons être debout, ensemble, face à la crise.
Je m'adresse à vous toutes et tous, y compris celles et ceux qui exercent en canine, qui voient parfois leurs confrères en zone rurale épuisés, accablés, et qui se demandent comment les soutenir. Le simple fait de relayer un message de confiance, d'informer correctement vos clients, d'expliquer ce que fait la profession dans l'intérêt collectif, est déjà un acte de solidarité.
Je vous appelle à la retenue, à la responsabilité, et à la solidarité. À ne pas alimenter, même par omission, les discours qui, sur les réseaux sociaux, jettent l'opprobre sur nos pratiques sans en c omprendre la complexité. Les prises de position publiques mal informées, souvent amplifiées par des canaux émotionnels, ne font qu'exacerber la douleur des éleveurs et l'isolement des vétérinaires en première ligne. Gardons-nous d'en être complices malgré nous.
Je vous le dis avec franchise et bienveillance : nous sortirons de cette crise plus forts si nous restons fidèles à ce que nous sommes. Des scientifiques engagés. Des praticiens de terrain. Des acteurs responsables de la santé publique vétérinaire.
Le SNVEL reste à vos côtés pour vous accompagner, vous soutenir et vous défendre. Dans cette période éprouvante, je vous redis ma reconnaissance profonde et mon admiration sincère.
Avec toute ma confiance et ma solidarité,
David QUINT
Président du SNVEL » ■