Troubles du comportement chez le chien : l'apport de la phytothérapie

La valériane présente un intérêt dans certains cas pour son action hypnotique et sédative, son impact sur le sommeil ainsi que son action sur le métabolisme Gaba et les récepteurs aux benzodiazépines.

© Daniel Vincek - Adobe

Corinne DESCOURS-RENVIER

Cas cliniques

A l'occasion d'une conférence en ligne organisée par le laboratoire Wamine, notre consoeur Nathalie Biais, comportementaliste et phytothérapeute, a présenté trois exemples d'utilisation de la phytothérapie dans le traitement des troubles du comportement chez le chien. Des probiotiques sont administrés en parallèle au traitement par les plantes.

Le laboratoire Wamine a organisé une conférence en ligne consacrée à l'utilisation de la phytothérapie dans le traitement des troubles du comportement chez le chien, en juillet. Notre consoeur Nathalie Biais, comportementaliste et phytothérapeute, a présenté trois cas cliniques illustrant son expérience dans ce domaine.

Un jeune chien « impossible à éduquer »

Elle a commencé par le cas d'un Labrador croisé, mâle, âgé de 10 mois. L'animal, issu d'une portée de 10 chiots, a été acquis à l'âge de 2 mois.

Il est référé après un traitement au Zylkène ND car il « ne se pose jamais » et « est impossible à éduquer » selon ses maîtres.

Le chien présente un déficit des auto-contrôles (sauts intempestifs, morsures...), du tournis et une coprophagie associée à une boulimie. Laissé seul, il cause des destructions importantes au domicile de ses propriétaires. « Hyposomniaque par ailleurs, il ne rêve jamais, un signe qui doit attirer l'attention du vétérinaire », précise notre consoeur.

Les plantes pour traiter l'hypersensibilité-hyperactivité

Un diagnostic d'hypersensibilité-hyperactivité est alors établi.

« Il s'agit d'un trouble du développement que j'observe de plus en plus fréquemment en clientèle », explique Nathalie Biais. « Au départ, les propriétaires ne sont pas responsables des problèmes rencontrés par leur chien mais leur réaction peut parfois aggraver la situation ».

Dopamine et surtout sérotonine vont être les cibles du traitement. Le but est de diminuer l'impulsivité du chien, faciliter l'acquisition des auto-contrôles, faire disparaître tournis et destructions, améliorer le sommeil et, si possible, lutter contre la boulimie, ce qui est malheureusement compliqué chez le Labrador...

Nathalie Biais choisit d'associer trois plantes :

Griffonia qui fournit de la sérotonine et augmente sadisponibilité, diminue l'appétit tout en augmentant la sensation de satiété et améliore à la fois la quantité et la qualité du sommeil1 ;

- passiflore pour son action sédative et tranquillisante, son activité IMAO2, son rôle dans la production de sérotonine et son effet sur le sommeil ;

- valériane pour son action hypnotique et sédative, son impact sur le sommeil3 ainsi que son action sur le métabolisme Gaba4 et les récepteurs aux benzodiazépines.

Les trois plantes sont associées à parts égales dans un mélange dont 3 ml sont administrés à l'animal matin et soir.

A ce traitement, notre consoeur associe des probiotiques, Floréquilibre ND, durant un mois. « C'est fondamental pour s'assurer que les plantes puissent agir correctement », explique-t-elle. Elle rappelle que le microbiote intestinal est très souvent impliqué dans les troubles du comportement.

Une amélioration dès le premier mois de traitement

Au bout d'un mois, le chien est plus calme mais il ne dort toujours pas assez. S'il n'occasionne plus de destruction, on observe encore du tournis et des sauts intempestifs.

Nathalie Biais ajoute alors du millepertuis à la préparation, à raison de 1 ml pour 10 kg de poids. « Une étude 5  réalisée sur 18 chiens a en effet montré l'efficacité de cette plante contre le tournis » , explique notre consoeur.

Au bout de 3 mois, le chien dort mieux et rêve enfin. Il ne saute plus et le tournis a cessé.

Au bout de 6 mois, les apprentissages s'améliorent à leur tour. Le traitement est alors diminué, à raison de 2 ml matin et soir6.

Au bout d'un an, les propriétaires sont satisfaits de la situation, même si la boulimie persiste.

Un sevrage progressif est mis en place 6 mois plus tard à leur demande.

Un chien âgé qui réveille ses propriétaires la nuit

Nathalie Biais présente ensuite le cas d'un West Highland white terrier âgé de 14 ans.

Les propriétaires décrivent des troubles du sommeil : le chien déambule et gémit avant de s'endormir (anxiété pré-hypnotique), se réveille en hurlant, peut uriner ou déféquer. Son appétit est capricieux. Des signes de pica sont également observés (chaussettes). Durant la journée, le chien reste en retrait dans son panier et interagit très peu avec ses propriétaires. « Dans ce type de situation, un cercle vicieux s'installe généralement, le chien étant de moins en moins stimulé par ses maîtres », déplore notre consoeur.

Même si le chien est par ailleurs en très bonne santé, les propriétaires, lassés, envisagent l'euthanasie.

Un diagnostic de dépression d'involution est alors établi :

- présence de signes de dépression chronique : dysorexie, troubles du sommeil, apathie, gémissements, déambulations ;

- associés à au moins deux signes d'involution : malpropreté, exploration orale ou perte des apprentissages.

Quel traitement pour éviter l'euthanasie

Le choix de Nathalie Biais se porte alors sur quatre plantes :

- le ginseng qui améliore les capacités physiques et les performances cognitives et a un effet neuroprotecteur ;

- le gingko, également neuroprotecteur, pour son action sur les performances cérébrales ;

- le mucuna pour son action anti dépressive liée à la dopamine, premier neurotransmetteur en cause chez les vieux animaux ;

- la valériane, anxiolytique, pour son action hypnotique et sédative et son impact sur le sommeil, élément primordial ici.

Le matin, le chien reçoit 1 ml d'un mélange à parts égales de mucuna/valériane/ginseng et, le soir, de mucuna/valériane/gingko7.

Des probiotiques, Floréquilibre ND, sont également prescrits durant un mois et une thérapie comportementale visant à stimuler le chien est instaurée (jeux).

Au bout d'un mois, il ne mange plus de chaussettes, les réveils nocturnes sont plus rares, de même que les épisodes de malpropreté. Cependant, le chien passe encore beaucoup de temps dans son panier.

Au bout de trois mois, il dort bien la nuit et le lien est rétabli avec ses propriétaires. Le traitement est conservé ad vitam.

Une sociopathie évoluant depuis plusieurs années

Le dernier cas présenté durant la conférence est celui d'un Jack Russell terrier mâle âgé de 8 ans.

Ce chien a « mauvais caractère » selon ses propriétaires. Il grogne sur les visiteurs et peut les attaquer. Il a déjà mordu des membres de la famille et des proches et agresse ses congénères. Il ne mange qu'en présence de ses maîtres, dort peu, surtout sur le canapé, et ne rêve pas. Il suit sa propriétaire partout et ronge les portes en son absence. Son obéissance est aléatoire. Il se mord et se lèche la cuisse depuis 4 ans.

Le diagnostic est celui d'une sociopathie associée à un état anxieux. « Des prérogatives hiérarchiques sont en effet accordées à cet animal, qui présente par ailleurs certains de ces signes qui sont caractéristiques d'une sociopathie : triade agressive (agressions territoriales, par irritation et hiérarchie), augmentation des prises de nourriture en présence des propriétaires, mictions hiérarchiques, destructions localisées aux issues, pseudocyèse8, chevauchements ou encore appropriation des enfants (défense ou contrôle) », explique Nathalie Biais.

Notre consoeur souligne toutefois que de nombreux chiens bénéficient de prérogatives hiérarchiques sans pour autant devenir sociopathes.

La thérapie comportementale, étape à ne pas négliger

Les propriétaires refusant un traitement allopathique, le choix se porte sur Sérénité comprimé ND qui associe Griffonia, passiflore, aubépine9, magnésium10 et vitamine B611. La posologie pour ce chien est d'un comprimé matin et soir.

Des probiotiques, Floréquilibre ND, sont également prescrits le premier mois et une thérapie comportementale visant à éduquer le chien est conseillée.

Après deux mois de traitement, les grognements ont disparu à 80 %. Le chien dort dans une niche et commence à rêver. Il ne se lèche presque plus la cuisse.

Au bout de quatre mois, il est calme et dort beaucoup plus longtemps. Ses maîtres n'ont toutefois pas le temps de travailler ses relations avec ses congénères.

« Le traitement de ce chien est toujours en cours », conclut la conférencière.

1 La sérotonine est métabolisée en mélatonine au niveau de la glande pinéale.

2 IMAO : inhibiteurs de la monoamine oxydase.

3 Améliore l'endormissement et agit sur le sommeil lent et le sommeil paradoxal. Intéressante notamment pour diminuer les réveils nocturnes chez les animaux âgés.

4 Acide gamma-aminobutyrique.

5 Bahman Mosallanejad & coll, Vet Research Forum, 2015;6(2):167-172.

6 Pour un poids de 22 kg.

7 Pas de ginseng le soir pour ne pas perturber le sommeil.

8 Gestation nerveuse.

9 Pour son effet anxiolytique.

10 Pour son action sur le métabolisme Gaba et la fabrication des neurotransmetteurs.

11 Pour son action sur la fabrication des neurotransmetteurs.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1677

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