Tensions sur le recrutement : l'OMPL cible des facteurs causaux

Les difficultés de recrutement sont élevées pour les fonctions de coeur de métier et notamment les vétérinaires salariés.

© Jean-Matthieu Ricard

Maud LAFON

Enquête

Comprendre les difficultés de recrutement dans les professions libérales en analysant les facteurs qui en sont responsables a été l'objet d'une étude publiée en juin par l'OMPL*. La profession vétérinaire n'est pas la plus à plaindre parmi les professions libérales. La pénurie de vétérinaires formés en France fait partie des facteurs mis en évidence.

Dans une étude publiée en juin, l'OMPL* analyse les tensions sur les recrutements qui concernent les professions libérales et précise la situation pour la profession vétérinaire. Selon l'organisme et s'agissant de l'ensemble des professions libérales, « la dimension des ressources humaines explique, en grande partie, les tensions actuelles ».

Il pointe notamment « la faible capacité de rétention des salariés en poste et d'attractivité des entreprises ».

Cependant, comparés aux autres professions libérales, « les cabinets et cliniques vétérinaires font face à des tensions de recrutement modérées ».

L'étude relie cette relative bonne nouvelle au fait que « les métiers supports (auxiliaires, secrétaires) qui rassemblent environ 50 % des effectifs de la branche rencontrent de faibles difficultés de recrutement ».

Indicateur de tension

L'une des finalités de l'étude était de proposer un indicateur permettant d'estimer les niveaux de tensions et de le décliner au niveau de la quarantaine de métiers exercés dans les branches professionnelles du périmètre de l'OMPL.

Ainsi, sur l'ensemble des métiers de la branche vétérinaire, cet indicateur de tension s'élève à 66 versus 79 pour l'ensemble du secteur santé, 75 pour la moyenne des professions libérales et 70 pour l'ensemble de l'économie. Des disparités existent cependant au sein du secteur.

Les difficultés de recrutement sont « élevées pour les fonctions de coeur de métier »  et notamment les vétérinaires salariés (indice de tension de 92). L'étude relie ces situations contrastées à un ensemble de facteurs dont  « un déficit d'attractivité et de rétention lié aux conditions salariales et de travail (horaires atypiques, pression, charge de travail) ; une intensité de la concurrence sur les salaires exercée par les groupes vétérinaires et les laboratoires privés ; un lien emploi-formation déficitaire et exacerbé par le manque de vétérinaires diplômés » (voir tableau).

L'étude dénonce certaines conditions de travail (charge, rythme, fréquence des gardes, pression managériale) qui engendrent « des difficultés de recrutement qui se cumulent et s'auto-entretiennent » et « poussent de nombreux vétérinaires salariés à vouloir quitter la profession pour se réorienter dans un secteur offrant de meilleures conditions de travail ».

Concurrence sur les salaires

Fait peu mis en avant jusqu'à présent, la concurrence sur les salaires exercée par les laboratoires pharmaceutiques privés attire de nombreux vétérinaires salariés et auxiliaires vétérinaires à les rejoindre aux dépens des cliniques vétérinaires. « La concentration croissante des cabinets et cliniques vétérinaires au sein de grands groupes, aux moyens économiques importants participe à renforcer les tensions puisque ces structures sont plus à même d'adapter leur niveau de rémunération », poursuit l'OMPL.

Dans le verbatim des vétérinaires employeurs interrogés dans cette enquête au sujet des principales causes de tension, un vétérinaire associé dénonce un « salaire vraiment trop bas » qu'il chiffre à 1 600/1 700 euros net par mois pour un vétérinaire salarié dans un cabinet pour 35 heures sans garde.

Autre facteur causal à la problématique du recrutement, l'attractivité des territoires est aussi une donnée à prendre en compte, les vétérinaires ne souhaitant pas aller en zone rurale. Par contre « les régions limitrophes de l'Espagne et de la Belgique jouissent de l'important vivier de vétérinaires diplômés de ces pays, ce qui apaise leurs tensions ».

Parmi les principales causes de tensions évoquées par les employeurs figure également la pénurie de vétérinaires formés liée à un numerus clausus trop restrictif alors même que « l'activité des cabinets vétérinaires augmente » , en particulier depuis la reprise post-Covid. L'OMPL estime que « le nombre de places offertes chaque année au concours vétérinaire n'augmente pas en proportions suffisantes pour répondre à la demande de vétérinaires sur le marché du travail » .

Dépendant des vétérinaires formés à l'étranger

L'organisme rapporte la position de certains employeurs qui pensent que la fusion des classes préparatoires vétérinaire et agronomie aggrave le problème mais il ne mentionne pas les nouvelles voies d'accès aux études vétérinaires (post-bac et école privée). L'OMPL ajoute que « les cabinets vétérinaires sont aujourd'hui dépendants de vétérinaires formés à l'étranger, ce qui renforce les difficultés de recrutement sur le long terme » .

Enfin, une dernière cause avancée par l'enquête concerne les « attentes croissantes de notions en médecine vétérinaire pour les métiers supports » , les petits cabinets étant en recherche de profils mixtes pour leur secrétariat et se tournant donc plutôt vers des auxiliaires vétérinaires.

« Toutefois, malgré l'existence d'une formation dédiée au titre d'auxiliaire spécialisé vétérinaire, du fait du nombre insuffisant d'auxiliaires spécialisés formés, les candidats disposant de compétences techniques attendues pour ces postes sont rares sur le marché du travail. Une formation interne, au coût important, est souvent requise » , souligne l'OMPL.

* OMPL : Observatoire prospectif des métiers et des qualifications dans les professions libérales.

Indicateur de tension pour les principaux métiers de la branche vétérinair

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1682

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