Syndrome vestibulaire du chien : les causes

Coupe tomodensitométrique transverse du crâne d'un bouledogue français présentant une otite moyenne et interne unilatéralement à gauche (flèche).

© D.R.

Tarek BOUZOURAA

Dip. ECVIM-CA (Internal Medicine)

Vetalpha

(69380 Dommartin)

Neurologie

Après les rappels anatomiques et les signes cliniques (lire DV n° 1610 et 1611), cet article présente les causes du syndrome vestibulaire du chien.

Le nystagmus et l'inclinaison du port de tête sont des signes fréquents chez le chien lors d'atteinte vestibulaire.

Le syndrome vestibulaire associe le plus souvent une inclinaison de la tête et un nystagmus. La présentation clinique peut être très impressionnante mais n'est pas toujours corrélée à la gravité et au pronostic. Le système vestibulaire possède une partie centrale (sur la moelle allongée et le cervelet) et périphérique (l'oreille interne).

L'identification du site atteint à l'aide de l'examen nerveux permet d'ordonner les recherches lors de la démarche diagnostique. Des signes d'atteinte faciale et sympathique oculaire sont parfois associés lors d'atteinte périphérique

Les causes de syndrome vestibulaire sont résumées dans le tableau. L'épidémiologie est confrontée aux données clinique et nerveuse.

Syndrome vestibulaire central

Dès lors que les noyaux vestibulaires sont touchés, le syndrome vestibulaire est central.

- Les causes inflammatoires de syndrome vestibulaire central incluent les méningo-encéphalites dysimmunitaires comme les méningo-encéphalites granulomateuses ou nécrosantes, rencontrées le plus souvent dans les petites races (Yorkshire terrier, bichon, chihuahua, spitz, carlin et bouledogue) [1-3]. Les méningo-encéphalites infectieuses sont rares à anecdotiques chez le chien (maladie de Carré, toxoplasmose, sans omettre la rage qui doit par principe incorporer le différentiel chez un chien non vacciné).

Pour les non infectieuses, un traitement immunomodulateur (corticoïdes, cytosine arabinoside, ciclosporine) est indiqué et le pronostic est variable.

- Chez le chien âgé, les tumeurs de l'encéphale ou du cervelet sont des causes non négligeables de syndrome vestibulaire central.

Les méningiomes, les tumeurs des gaines nerveuses périphériques (nerf VIII ou éventuellement du VII par contiguïté qui peuvent entraîner un syndrome vestibulaire) ou des plexus choroïdes (quatrième ventricule) comptent parmi les tumeurs intracrâniennes les plus fréquentes [1-3].

Les signes cliniques sont le plus souvent insidieux et progressifs, parfois sans nystagmus.

La prise en charge des tumeurs intracrâniennes est complexe.

L'exérèse chirurgicale est souvent impossible car la plupart des tumeurs sont inaccessibles sans très grandes morbidité et mortalité.

La radiothérapie et les soins anticancéreux ont également un apport limité [8].

- Le métronidazole est la molécule neurotoxique qui peut causer un syndrome vestibulaire central bilatéral (généralement sans inclinaison du port de tête). Les chiens intoxiqués présentent également des signes d'atteinte cérébelleuse (hypermétrie, tremblements intentionnels). La dose toxique est de 30 à 60 mg/kg/jour.

L'arrêt du traitement associé à la prescription de diazépam permet une résolution rapide en environ 1 semaine [1-3].

- Un accident vasculaire cérébral (AVC) succède à un thrombus ou un vasospasme artériolaire (formes ischémiques) ou une hémorragie cérébrale.

Les AVC cérébelleux sont fréquents et le plus souvent consécutifs à une forme ischémique sans cause sous-jacente.

Les signes cliniques sont le plus souvent suraigus chez des chiens à profil « hypercoagulable » via un processus inflammatoire chronique, une hyperviscosité sanguine (hyperlipémie, hyperglobulinémie, érythrocytose, thrombocytose), une cardiopathie, voire une microangiopathie néoplasique (carcinome, hémangiosarcome) [1-5].

- Les malformations congénitales, les traumatismes et les neuropathies dégénératives (abiotrophie, maladie de stockage lysosomiale, hypoplasie cérébelleuse) sont d'autres causes rares de syndrome vestibulaire central.

Syndrome vestibulaire périphérique

- Les causes inflammatoires, telles que les otites moyennes et internes, doivent être envisagées à tout âge. Elles succèdent le plus souvent à une otite externe, bien qu'un foyer nasopharyngé puisse causer une otite moyenne/interne via la trompe d'Eustache.

Ces affections sont notamment rencontrées chez les races brachycéphales et les cavaliers king Charles (ces derniers présentant des otites moyennes/internes sécrétantes initialement stériles mais qui se surinfectent) [1-3].

Ces otites bactériennes sont causées par les germes suivants : Staphylococcus spp., Streptococcus spp., Pseudomonas aeruginosa, Proteus spp., avec surinfection par Malassezia pachydermatis.

Leur prise en charge précoce évite une aggravation en empyème méningé, voire, chroniquement en néoformation bénigne localement agressive et lytique : le cholestéatome (photo) [1-3].

- Comme son nom l'indique, le syndrome vestibulaire aigu idiopathique gériatrique est rencontré chez le chien âgé. Sa cause est méconnue, bien qu'une origine lymphovasculaire impliquant des accidents thrombotiques soit présumée [1-3]. Sa survenue est brutale, avec des chutes, une ataxie asymétrique, un port de tête incliné générant une excitation et une anxiété qui peuvent tous deux mimer des crises convulsives focales complexes, voire généralisées [1-3].

L'évaluation initiale est difficile, surtout chez les chiens de grandes races qui chutent et roulent. Des vomissements sont parfois rapportés, en lien avec la nausée générée par l'atteinte vestibulaire.

L'exclusion des autres causes et la récupération relativement rapide et subtotale après 3 jours à 3 semaines confortent le diagnostic.

- L'hypothyroïdie peut se compliquer par un syndrome vestibulaire périphérique, surtout chez le chien âgé. Les signes sont souvent discrets (faiblesse généralisée et autres anomalies des nerfs crâniens comme un syndrome de Claude Bernard Horner) [1-3].

- Un traumatisme du rocher et les produits ototoxiques (chlorhexidine, aminosides, cisplatine), peuvent causer un syndrome vestibulaire périphérique.

- Des cas anecdotiques de tumeur du conduit auditif ou de l'oreille moyenne (adénocarcinome et sarcome) sont rapportés. Très rarement, des tumeurs des gaines nerveuses périphériques du trijumeau peuvent entraîner une atteinte périphérique, compte tenu de la contiguïté entre ses racines et celles du nerf VIII [1-3].

- Chez le chiot, une malformation congénitale doit être envisagée en priorité [1 - 3]. Elle peut également causer une surdité, bien que très rares mais surreprésentées chez le berger allemand, le cocker anglais, le doberman et le fox terrier.

Les formes autorésolutives

Nommée forme « épisodique » par les Anglo-Saxons et quasi exclusivement rapportée chez le chien, la forme autorésolutive ne dure que quelques secondes/minutes avec inclinaison du port de tête et nystagmus.

Elle surviendrait à l'excitation, éventuellement par accidents ischémiques transitoires (AIT prémices d'AVC) ou de poussées hypertensives. Cependant, leur origine et leur mécanisme restent méconnus [1-5].

Un prochain article présentera la démarche diagnostique et la prise en charge en urgence du syndrome vestibulaire chez le chien.

Bibliographie

1. Sammut V. Vestibular Disease. In : Ettinger SJ, Feldman EC, Cote E, eds, Textbook of veterinary internal medicine. 8th ed. Philadelphia : Elsevier ; 2017 : 1421-8.

2. DeLahunta A, Glass E. Vestibular system : special proprioception. In : DeLahunta A, Glass E, eds, Veterinary neuroanatomy and clinical neurology. 3rd Edition. St. Louis : Elsevier ; 2009 : 319-47.

3. Muñana KR. Head tilt and nystagmus. In : Platt S, Olby N, eds, BSAVA Manual of Canine and Feline Neurology. 4th Edition. Gloucester : British Small Animal Veterinary Association ; 2014 : 195-212.

4. Rossmeisl JH. Vestibular disease in dogs and cats. Vet Clin North Am Small Anim Pract. 2010 ; 40 : 81-100.

5. Orlandi R et coll. Clinical signs, MRI findings and outcome in dogs with peripheral vestibular disease : a retrospective study. BMC Vet Res. 2020 : 16 : 159. Consultable sur : https://bmcvetres.biomedcentral.com/ articles/10.1186/s12917-020-02366-8. Dernier accès le 8 avril 2021.

6. Bongartz U et coll. Vestibular disease in dogs : association between neurological examination, MRI lesion localisation and outcome. J Small Anim Pract. 2020 ; 61 : 57-63.

7. Troxel MT et coll. Signs of neurologic dysfunction in dogs with central versus peripheral vestibular disease. J Am Vet Med Assoc. 2005 ; 227 : 570-4.

8. Hu H et coll. Systematic Review of Brain Tumor Treatment in Dogs. J Vet Intern Med. 2015 ; 29 : 1456-63.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1612

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