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Suivi de « lignées cryptiques » du Sars-CoV-2 dans des eaux usées : résultats non concluants sur l'hypothèse du rat comme animal réservoir

Pour expliquer la présence de ces « lignées cryptiques » anormales dans les eaux usées de la ville de New York, les auteurs de l'étude émettent plusieurs hypothèses.

© Mads - Adobe

Jeanne BRUGÈRE-PICOUX

Membre de l'Académie nationale de médecine et de l'Académie vétérinaire de France

Épidémiologie

Une étude reposant sur le séquençage ciblé sur la spicule du Sars-CoV-2 détectée dans les eaux usées de New York a mis en évidence des mutations rarement observées dans les échantillons cliniques de Covid-19 chez l'Homme. La première hypothèse est qu'elles proviennent d'infections humaines par des variants du Sars-CoV-2 qui n'auraient pas été détectés. L'autre hypothèse est que ces séquences appartiennent à des variants qui se seraient adaptés à une espèce animale, en l'occurrence le rat, qui en serait, à ce titre, réservoir.

Pour surveiller la présence de nouveaux variants du Sars-CoV-2 à New York, les auteurs d'une étude publiée dans Nature Communications* ont séquencé le RBD (recepteur binding domain) de la protéine S (spicule) du Sars-CoV-2 dans les eaux usées de cette ville.

Ils ont dénommé ces petites séquences d'ARN « lignées cryptiques ».

Or, ces « lignées cryptiques » ne correspondent pas à des coronavirus inclus dans la base de données EpiCoV du Gisaid**. Ces séquences présentent des mutations rarement observées dans les échantillons cliniques de Covid-19 chez l'Homme (notamment les mutations Q493K, Q498Y, E484A et T572N) et partagent de nombreuses mutations avec le variant Omicron.

Pseudovirus résistants

Certaines de ces mutations suggèreraient un tropisme d'hôtes plus rare car des pseudovirus du Sars-CoV-2, construits après insertion de ces séquences, sont capables d'infecter des cellules exprimant les récepteurs ACE2 de l'Homme, de la souris et du rat. Enfin, ces pseudovirus se sont révélés résistants à l'égard de différentes catégories d'anticorps monoclonaux neutralisant le RBD.

Pour expliquer la présence de ces « lignées cryptiques » anormales dans les eaux usées de la ville de New York, les auteurs de l'étude émettent plusieurs hypothèses.

La première hypothèse est qu'elles proviennent d'infections humaines par des variants du Sars-CoV-2 qui n'auraient pas été détectés. L'autre hypothèse est que ces séquences appartiennent à des variants qui se seraient adaptés à une espèce animale qui en serait, à ce titre, réservoir.

Afin de confirmer cette hypothèse, il aurait fallu détecter ces séquences chez les animaux dont le génome a été retrouvé dans les eaux usées de la ville de New York, à savoir l'Homme, le chat, le chien, le rat, la souris, le lapin, le mouton et le porc. Malheureusement, cette recherche n'a pas été menée dans le cadre cette étude.

Pas de source identifiée

En conclusion, les auteurs reconnaissent que leurs données comportent plusieurs limites car la source de ces nouvelles lignées n'a pas été identifiée pour le moment. Le séquençage ciblé sur la spicule du Sars-CoV-2 n'identifie que les mutations de la région ciblée. En outre, à ce jour, il n'a pas été possible d'isoler des virus viables dans les eaux usées de manière à pouvoir séquencer des génotypes de virus uniques.

Deux co-auteurs de cette étude ont été interviewés dans un journal américain***. Selon Marc C. Johnson, virologiste (université du Missouri), l'une des modifications des acides aminés a été observée dans un virus adapté aux rongeurs. Le rat pourrait jouer un rôle de réservoir permettant l'émergence d'un nouveau variant car ces « lignées cryptiques » ont toutes acquis la capacité d'utiliser le récepteur du rat.

L'autre co-auteur, John Dennehy (Queens College), virologiste, considère qu'il est possible que les rats de New York aient pu être infectés en buvant l'eau des égouts ou en mangeant des excréments. 

* Smyth, D.S., Trujillo, M., Gregory, D.A. et al. Tracking cryptic SARS-CoV-2 lineages detected in NYC wastewater. Nat Commun 13, 635 (2022). https://doi.org/10.1038/s41467-022-28246-3 

** Le Gisaid (Global Initiative on Sharing Avian Influenza Data) participe au suivi des variants du Sars-CoV-2.

*** Spivak Caroline. New York City Might Have Rat COVID, But It's Probably Fine. New York Curbed ; 2022.

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