BI Journée mondiale des vétérinaires

Stages : entre intérêt pédagogique et support d'orientation

Les stages offrent aux étudiants un perfectionnement clinique très attendu.

© Oniris

Maud LAFON

Formation

Galop d'essai avant l'entrée dans la vie professionnelle, les stages sont un dispositif pédagogique obligatoire dans tous les établissements de formation vétérinaire, qu'il s'agisse des quatre écoles nationales ou de la nouvelle école privée. Si leur valence pratique est plébiscitée par les étudiants, les stages ont aussi un intérêt dans le choix d'orientation professionnelle, en donnant aux étudiants un avant-goût de ce qu'ils envisagent, utile pour confirmer une voie professionnelle. Pour les structures d'accueil, c'est aussi un moyen de se faire connaître en vue de potentiels recrutements.

Unités d'enseignement à part entière, les stages sont obligatoires dans le cursus de formation vétérinaire mais, que ce soit en termes de planning ou de thèmes, les écoles nationales vétérinaires (ENV) et l'école vétérinaire privée ne suivent pas toutes les mêmes pratiques et sont libres du schéma d'intégration des stages au sein du cursus.

Si leur principale difficulté, il y a quelques décennies, était de trouver un lieu de stage qui les accepte, les étudiants que nous avons interrogés semblent aujourd'hui avoir l'embarras du choix. Leurs réserves portent davantage sur les modalités de réalisation du stage, notamment l'hébergement, et les attributions qui leur seront confiées, leur principale hantise étant de « faire plante verte » lors des stages dit d'observation.

Attrait pour la clinique

Cet attrait pour la clinique des étudiants n'est pas nouveau, les enquêtes successives menées notamment par l'association Vétos Entraide (lire DV n° 1658) ayant déjà montré cette appétence des futurs confrères pour la mise en application de leurs connaissances théoriques.

Les stages, à mesure qu'ils avancent dans le cursus, leur permettent ce perfectionnement pratique et leur servent aussi à conforter un choix d'orientation professionnelle.

Qu'il s'agisse de stage classique ou de stage tutoré, leurs bénéfices sont donc unanimement reconnus par tous et les mauvaises expériences semblent rares.

Le dispositif StageVet (www.stagevet.fr) mis en place par le SNVEL*, La Dépêche Vétérinaire et les quatre ENV, avec l'appui de l'Afvac**, l'Avef*** et la SNGTV****, facilite encore l'accès aux stages et surtout simplifie la vie des praticiens qui se proposent comme encadrants, notamment sur le plan des démarches administratives. S'il n'a pour l'instant été systématisé qu'à l'école vétérinaire d'Alfort, il est en cours de déploiement dans les autres ENV et pourrait, à l'avenir, être proposé également dans la nouvelle école vétérinaire privée du campus UniLaSalle de Rouen.

Plus de 1 000 offres de stage

Le succès de la plate-forme se mesure à l'offre d'annonces qu'elle recense avec, au 20 octobre, 2 092 étudiants inscrits, 371 enseignants, 1 208 cliniques et 1 478 maîtres de stage.

« StageVet permet aux cliniques de proposer des stages « à armes égales », de formaliser le partenariat pédagogique entre les ENV et les maîtres de stages et de faciliter la réalisation et l'accueil de stagiaire grâce à une gestion 100 % en ligne », soulignent ses concepteurs.

Les vétérinaires qui se proposent pour l'accueil des stagiaires semblent plus engagés qu'il y a quelques années et vivent cette cohabitation comme un apport mutuel plus qu'une contrainte imposée. StageVet permet d'ailleurs un rééquilibrage des rôles : ce ne sont plus seulement eux qui sont sollicités mais ils participent à la démarche en déposant leur annonce d'accueil.

Outre ces stages cliniques, le cursus vétérinaire intègre également un certain nombre de stages sur des thèmes périphériques mais utiles à la vie professionnelle d'un vétérinaire : découverte du fonctionnement d'une exploitation agricole, recherche, abattoir, laboratoire d'analyses ou pharmaceutiques, environnement, santé publique... sans compter les stages facultatifs que les étudiants sont libres de choisir à leur guise.

Compléter la formation scolaire

Globalement, ces derniers sont très motivés et friands de stages et, loin d'être un passage subi, ces expériences les enrichissent et leur permettent de compléter avantageusement leur formation scolaire.

Dans l'optique de répondre à la problématique actuelle de maillage que connaît la profession dans certains territoires ruraux, l'accent est mis sur les stages en milieu rural avec plusieurs semaines obligatoires dans une clinique rurale ou mixte au cours du cursus.

La dominante Animaux de production en A6 est également la seule qui bénéficie du dispositif de stages tutorés qui concerne 115 étudiants des quatre ENV pour 2023-2024 versus 31 à son lancement en 2017.

Etape intermédiaire

Ce stage se déroule - après une prise de contact avec la structure d'accueil lors d'une phase préalable de 15 jours - sur une période de 16 à 18 semaines dans la même structure. Il est encadré par un enseignant désigné dans chaque école et son objectif est l'acquisition de l'autonomie. Pour de nombreux étudiants interrogés, sa finalité sous-jacente est aussi de conforter ou d'infirmer leur choix d'exercice mixte.

Les étudiants qui se sont engagés dans des stages tutorés en A6 Animaux de production sont généralement très satisfaits de cette modalité d'apprentissage et la voient comme une étape intermédiaire bienvenue avant l'entrée dans la vie professionnelle. Certains vont même encore plus loin et le complètent par un internat.

Certes, les stages pourraient faire l'objet d'améliorations, notre confrère Hubert Brugère, directeur de formation à l'ENVT, appelant par exemple à leur meilleure répartition sur l'année universitaire en évitant les périodes de vacances universitaires pour les stages obligatoires. Il aimerait également « améliorer la collaboration pédagogique avec les maîtres de stage via, par exemple, la mise en place d'un module de formation en e-learning préalable à l'accueil d'un stagiaire pour leur rappeler les objectifs pédagogiques de chacun des stages ».

Globalement, les stages sont un passage apprécié des étudiants et dont l'utilité est prouvée.

* SNVEL : Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral.

** Afvac : Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie.

*** Avef : Association vétérinaire équine française.

**** SNGTV : Société nationale des groupements techniques vétérinaires.

Gros Plan : Gagner en expérience et conforter sa voie

Pour les étudiants, les stages, qu'ils soient obligatoires ou facultatifs, visent en priorité à développer, voire acquérir, des compétences pratiques et de l'assurance. Les stages effectués dans différentes filières leur permettent aussi de s'assurer que la voie qu'ils envisagent est la bonne. Voici le ressenti de quelques étudiants des écoles nationales vétérinaires sur ce parcours de stages intégré à leur cursus. Globalement, ils n'ont eu aucun mal à trouver des lieux de stage.

Pauline Martin , actuellement en A5 à VetAgro Sup, vise une filière tutorée l'an prochain pour devenir praticienne généraliste mixte. Elle cumule actuellement 93 jours de stages obligatoires qu'elle a effectués dans différentes structures : élevage laitier, cliniques, GDS...

En plus de ce planning imposé, elle effectue tous les étés des stages facultatifs en clinique vétérinaire mixte canine/rurale pendant environ 4 semaines cumulées.

Ses stages, elle les trouve principalement sur Facebook grâce aux groupes qui répertorient les lieux de stage, sur le site Internet de l'école, animé par les étudiants, ou encore par le bouche-à-oreille, en sollicitant les cliniques dans lesquelles sont conduits les animaux de sa famille.

Cette relative facilité d'accès aux stages lui permet de se fixer quelques critères : pratique orientée sur la mixte, retours positifs d'autres étudiants, bonne ambiance, proche d'un endroit où elle peut se loger ou avec logement fourni.

Apprentissage des gestes techniques

Si elle n'a pas vécu à proprement parler de mauvaises expériences lors de ses stages, elle déplore les semaines d'observation stricte, sans être autorisée à pratiquer un minimum.

Ses attentes portent d'ailleurs sur la pratique et l'apprentissage de gestes techniques.

Globalement, les stages lui permettent de retenir les aspects cliniques des cas suivis. « Personnellement, je n'arrive pas à n'apprendre que par les livres, j'ai besoin d'avoir vu le cas une fois pour retenir » , souligne-t-elle. 

Tout juste sorti de VetAgro Sup, Axel Faure soutiendra sa thèse fin octobre. Il envisage lui-aussi de devenir un vétérinaire mixte, à dominante canine, et a déjà commencé à travailler dans une clinique canine pure à Saint-Magne-de-Castillon, en Gironde.

Critères de logement

Il a réalisé l'ensemble des stages obligatoires du cursus de VetAgro Sup pour un total de 20 semaines. Il a également effectué des stages facultatifs (2 semaines chaque été en fin d'A2, A3, A4) « afin d'être plus à l'aise et d'être formé sur des actes puisque je retournais à chaque fois dans la même clinique » , explique-t-il. 

Pour lui, le choix des lieux de stage se faisait principalement par le bouche-à-oreille, en fonction de critères de logement et de la formation pratique dispensée par les vétérinaires encadrants. Il ne déplore lui non plus aucune difficulté dans cette tâche de recherche.

S'il a pu « avoir l'impression de déranger pendant un stage » , il n'a pas connu de mauvaise expérience et ses attentes qui étaient de se sentir intégré dans la clinique, de comprendre le fonctionnement et d'être formé sur des actes, « ont été globalement très bien remplies au cours de (ses) stages » . Cet apprentissage lui a été très utile pour son premier poste.

En dernière année à l'école vétérinaire d'Alfort (ENVA), Marianne Kordes effectue, en parallèle, des gardes dans une clinique de l'Essonne et est directrice marketing pour l'association Hackavet qu'elle a créée avec des amis de l'école. Elle se destine à la pratique canine « dans une clinique plutôt familiale »

De sa propre initiative

Au cours de sa scolarité, elle a effectué quatre stages en clientèle dont deux à son initiative en A3 « pour pratiquer un peu plus, car les études de vétérinaire sont très théoriques pendant les 3 premières années, et avoir donc l'opportunité de réaliser des gestes techniques et d'être plus à l'aise pour la suite »

Pour cela, elle s'est tournée vers la clinique du vétérinaire qui s'occupe des animaux de sa famille et chez qui elle avait déjà fait son stage de 3 e au collège. Elle s'est également rendue entre la 2 e et la 3 e année dans une clinique mixte à dominante rurale pour « gagner en expérience » et aussi « vérifier (qu'elle) ne passait pas à côté de quelque chose en voulant faire uniquement de la canine, et non de la rurale ».

« Ce stage m'a conforté dans mon choix de carrière en exercice canin » , souligne-t-elle.

L'école imposant un stage à l'étranger en A5, elle a effectué ce dernier dans une clinique rurale en Irlande, ce qui lui a permis d'y découvrir la pratique rurale et ses différences avec la France.

Comme les autres étudiants interrogés, elle affirme n'avoir eu aucun mal à trouver des cliniques partantes pour l'accueillir. Elle a orienté son choix sur la zone géographiques et les possibilités de logement et s'est également beaucoup basée sur les témoignages des étudiants ayant fait des stages dans ces cliniques avant elle : ambiance de la clinique, possibilité de réaliser des gestes techniques, implication du maître de stage, type d'activité (généraliste ou plus spécialisé), etc. « J'avoue aussi beaucoup regarder le site Internet des cliniques que je choisis. Je trouve que c'est une façade importante pour une clinique vétérinaire et que ça donne déjà une bonne première idée » , ajoute-t-elle.

Découverte du quotidien

Pas vraiment non plus de mauvaises expériences pour elle lors des stages si ce n'est « une découverte de la réalité du métier de vétérinaire, qui n'est pas si rose que ce qu'on s'imagine quand on est plus jeune : gardes régulières et parfois très chargées, conflits ou difficultés de communication avec les clients, responsabilités importantes et charge mentale assez lourde, etc. ». « Mais c'était pour moi un avantage de découvrir tout ça et de pouvoir s'en rendre compte avant d'être sur le terrain. C'est tout l'objectif d'un stage », poursuit-elle.

Ses stages lui ont ainsi permis de mieux découvrir le métier et le quotidien d'un vétérinaire, d'avoir la possibilité d'être actif et de réaliser des gestes techniques, de discuter avec des vétérinaires et ASV, de consolider ses connaissances, de conforter son choix de carrière... Au final, ils lui ont été utiles tant pour les connaissances que l'aspect relationnel avec les vétérinaires, les ASV et les clients.

« Ils m'ont également permis d'avoir une meilleure idée des points que j'aimerais retrouver ou non dans mon exercice quotidien plus tard et je pense donc que cela m'aidera à choisir la clinique dans laquelle je travaillerai l'année prochaine. J'ai encore un stage obligatoire prévu cette année, cette fois-ci de 3 semaines en clinique 100 % canine, et je pense que sa plus-value sera d'autant plus importante que je suis maintenant en dernière année et que j'ai déjà commencé à exercer dans le contexte de mes gardes » , ajoute-t-elle. 

Un peu frustrant

Pour sa part, Olivia Roger , étudiante en A5 à l'ENVA, se dit globalement satisfaite des stages qu'elle a effectués même s'ils ne lui ont pas permis de réaliser beaucoup de gestes techniques, « ce qui est compréhensible mais en même temps un peu frustrant » .

Elle envisage une A6 équine suivie d'un internat et peut-être d'une résidence.

Ses précédents stages ont d'ailleurs été orientés sur cette valence équine et elle prévoit d'en faire deux autres (facultatifs) cette année en plus de son stage obligatoire en clinique mixte qu'elle effectuera en Irlande.

Elle indique n'avoir « jamais eu trop de difficultés » à trouver ses stages et les avoir choisis par leur position géographique. Son stage obligatoire cette année, prévu en Irlande, lui pose plus de difficultés.

Si, comme les autres, elle ne déplore pas vraiment de mauvaises expériences au cours de ses stages, elle regrette ceux dans lesquels elle n'a eu que l'occasion d'observer sans pratiquer.

Pour autant, ses attentes vis-à-vis des stages sont réalistes et les stages lui ont « toujours été très utiles » .

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1681

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