SARS-CoV-2 : nécessaire surveillance chez les animaux

La possibilité que cette maladie passe d'anthroponose (contamination de l'Homme vers l'animal) à zoonose (transmission dans les deux sens) inquiète la communauté scientifique, notamment après les récents épisodes de propagation du virus dans les élevages de visons néerlandais et espagnols.

© Nattakorn - Adobe

Aurore HAMELIN

Santé publique

Une étude publiée le 18 juin tente d'évaluer le risque que la Covid-19 puisse se transmettre de l'animal à l'Homme et souligne la nécessité de tester un grand nombre d'animaux. Le risque que certaines espèces animales deviennent un réservoir doit aussi être pris en compte.

Un article paru dans le Lancet Microbe, le 18 juin, de Santini et Edwards (Institut de biologie moléculaire et structurelle, University College London, Grande-Bretagne), pourrait se lire comme un appel à la mobilisation de tous les vétérinaires.

Les auteurs rappellent que la Covid-19, maladie humaine causée par le virus SARS-CoV-2, est une maladie zoonotique probablement issue des chauve-souris, les espèces animales intermédiaires n'ayant pas encore été clairement identifiées. La possibilité que cette maladie passe d'anthroponose (contamination de l'Homme vers l'animal) à zoonose (transmission dans les deux sens) inquiète la communauté scientifique, notamment après les récents épisodes de propagation du virus dans les élevages de visons néerlandais et espagnols.

Infections possibles chez une variété de mammifères

Les auteurs évaluent les risques au travers de dix études. Outre les cas déjà connus de contamination par l'Homme de chats et de chiens, les infections expérimentales se sont révélées possibles pour une variété de mammifères : singes, furets, hamsters, chats .

L'objectif principal de ces expériences était de trouver un modèle animal approprié pour étudier la maladie humaine ou d'identifier les hôtes intermédiaires. Une étude sur les dix rapporte des résultats négatifs, jugés improbables, pour toutes les espèces. Des études contradictoires sont mentionnées pour le porc.

Pas d'infection expérimentale chez la souris

En l'absence d'études expérimentales ou lorsque les données se contredisent, la modélisation des interactions entre la protéine spike* du virus SARS-CoV-2 et l'enzyme de conversion de l'angiotensine 2 peut fournir des éléments sur le potentiel d'infection. Le résultat de ces études informatiques** suggère de porter son attention sur les lapins, moutons, bovins, chèvres et chevaux.

L'autre fait marquant, donné par ces études informatiques, est l'absence d'infection expérimentale chez la souris (et supposée chez le rat). Une étude additionnelle montre la possibilité d'infecter la souris avec un variant du SARS-CoV-2 (variant d'un acide aminé sur la protéine spike), infection entraînant alors des signes cliniques de la Covid-19.

Aucune étude expérimentale ou basée sur des données estimées ne peut confirmer qu'une espèce animale est hors d'atteinte d'une infection par la Covid-19.

Il semble nécessaire de tester un grand nombre d'animaux, de combiner l'épidémiologie de terrain au diagnostic clinique pour suivre l'infection. Il sera plus ardu de suivre la transmission du virus lorsqu'il circulera hors de l'espèce humaine.

Beaucoup d'incertitudes

Selon les auteurs, les dix études classent prématurément le risque de transmission (faible, moyen ou élevé) sur la base d'estimations de probabilité précoce d'une infection simple. Une faible probabilité d'un résultat à fort impact, comme une nouvelle espèce réservoir, doit être prise en compte selon les auteurs. Évaluer ces risques de contamination implique d'examiner notre capacité à isoler, protéger et contenir les animaux qu'ils soient domestiques, de rente ou sauvages.

Les chats et les chiens ont des populations suffisantes pour être des réservoirs. Les porcs et les visons pourraient aussi le devenir. Les rongeurs pourraient agir également comme réservoir, leur nombre et leur densité suffisant à assurer une transmission continue. Cette hypothèse est étayée par une étude de modélisation qui prévoyait que les écureuils seraient infectés. Cependant, d'autres études ont montré un risque faible, voire nul, quant à l'infection des rongeurs.

« Des stratégies de mise en oeuvre de mesure de surveillance précoce devraient découler des résultats de ces études », concluent les auteurs.

* La protéine spike du virus SARS-CoV-2 est une protéine de surface sur laquelle se fixe notamment des lymphocytes B mémoire, producteurs d'anticorps séroneutralisants.

** Il faut entendre, par « étude informatique », les études mathématiques et modélisations faites par l'intermédiaire de l'outil informatique (computational studies) pour fournir des données estimées.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1536

Envoyer à un ami

Mot de passe oublié

Reçevoir ses identifiants