Proposition de loi Bien-être : il faut se réjouir de l'objectif de ces dispositions, selon Jean-François Rousselot

Jean-François Rousselot, président de l'Afvac, propose d'adjoindre à ces mesures un stage obligatoire et payant de formation à la compréhension des conséquences de la maltraitance animale.

© D.R.

Réaction

A la suite du dépôt d'une proposition de loi (DV n° 1537) pour lutter contre la maltraitance faite aux animaux de compagnie (https://bit.ly/3iOXLfN), La Dépêche Vétérinaire va à la rencontre des organisations professionnelles afin de connaître l'accueil réservé à cette démarche. Jean-François Rousselot, président de l'Afvac*, espère que les institutions vétérinaires seront consultées pour la rédaction des décrets d'application.

La Dépêche Vétérinaire : Que pensez-vous du durcissement des sanctions pénales pour actes de maltraitance prévu par la propositionde loi ?

Jean-François Rousselot, président de l'Afvac* : Ce projet de loi comporte de nombreux éléments dont un grand nombre appelle à des précisions qui seront apportées par les différents décrets à paraître si la loi est votée.

Il en résulte une certaine difficulté pour comprendre et apprécier toute l'étendue des conséquences que pourra avoir cette loi sur notre société et sur notre profession.

De nombreuses questions méritent d'être posées et, au sein du comité exécutif de l'Afvac, l'analyse du texte a suscité un débat constructif mettant bien en lumière les compléments qui seront indispensables pour que cette loi et ses décrets atteignent ses objectifs ambitieux.

Pour ce qui concerne le durcissement des sanctions pénales, il nous apparaît que son intérêt majeur est de bien mettre en exergue le concept de maltraitance dans un contexte où la dimension sociétale prise par l'animal de compagnie exclut heureusement toute souffrance de ce dernier.

Nous avons même formulé une proposition complémentaire à ces mesures : celle d'adjoindre à ces mesures un stage obligatoire et payant de formation à la compréhension des conséquences de la maltraitance animale.

D.V. : Comment percevez-vous la proposition d'élargissement du mandat sanitaire des vétérinaires ?

J.-F.R. : L'habilitation sanitaire est une originalité française qui unit praticiens et administration sanitaire vétérinaire de notre pays.

C'est la lutte contre la rage qui est, actuellement, le sujet presque unique des échanges entre les vétérinaires « canins » et leurs directions départementales de la protection des populations (DDPP).

La considération du concept One Health, la forte proximité Homme/animal de compagnie, la recherche du bien-être animal ont suggéré de renforcer les liens autour de cette habilitation, voire du mandatement.

Dans le cadre des rencontres de la profession, un module de Afvac Le congrès conjointement organisé avec l'Avef**, le CNOV***, la SNGTV****, le SNVEL***** et conçu avant la crise de la Covid-19, avait projeté de donner un nouvel éclairage sur le mandat sanitaire canin.

Ce module conclura sur la nécessité de la création d'un réseau d'épidémio-surveillance des affections et, en particulier, des maladies d'origine infectieuses et génétiques. 

Les récents doutes sur la responsabilité animale dans la crise sanitaire que nous connaissons valide grandement l'importance de relations repensées entre le vétérinaire canin et les DDPP.

La proposition de loi étend très sensiblement le cadre du mandat sanitaire avec des missions de pédagogie mais aussi de signalement.

Nous espérons que les modalités fassent l'objet d'une discussion et d'un accord entre la profession et les autorités sanitaires.

D.V. : Selon vous, quel impact sur la responsabilisation des propriétaires aura l'acquisition d'une attestation de connaissances minimales ?

J.-F.R. : Le principe est séduisant dans le sens où il entraverait très positivement les décisions trop rapides et non réfléchies d'acquérir un animal de compagnie.

Mais la mise en place de cette formation sanctionnée par l'attestation ne sera pas simple pour que cette mesure soit à la fois suivie, efficace sans pour autant décourager les « vrais » amateurs d'animaux de compagnie.

Si nécessaire, notre association pourra contribuer, pour les aspects techniques, à la rédaction du décret.

D.V. : Pensez-vous que ces propositions permettent de lutter efficacement contre la maltraitance faite aux animaux de compagnie ? Ces propositions vous semblent-elles applicables au quotidien ?

J.-F.R. : La lutte contre la maltraitance, voire la malveillance lorsqu'elle est identifiable, n'est pas nouvelle pour notre profession qui, à chaque fois qu'elle le peut et pour des degrés très divers de ces déviances, s'engage sans retenue contre elles.

La promulgation de la loi avec des décrets bien adaptés et un engagement plein des services de l'Etat seront une aide solide pour renforcer cette lutte et réduire le nombre des abandons.

Il est bien difficile de répondre à la question de l'applicabilité de ces propositions avant d'avoir les précisions qu'apporteront les décrets.

On peut toutefois raisonnablement espérer que, compte tenu du contexte et de la loi, de son concepteur (Loïc Dombreval est un confrère) et de l'adaptabilité de notre profession, les mesures finales seront applicables, surtout si les instituions vétérinaires sont consultées pour la rédaction des décrets d'application.

D.V. : Selon vous, quels seraient les répercussions de ces propositions sur la pratique vétérinaire en animaux de compagnie ?

J.-F.R. : Il faut d'abord se réjouir de l'objectif de ces futures dispositions : lutte contre la maltraitance animale et réduction des abandons. C'est un combat qui nous est cher et toute pierre ajoutée à cet édifice nous enthousiasme. La seconde raison de suivre avec une attention bienveillante l'évolution de cette loi est que le vétérinaire y est considéré comme un maillon indispensable du bien-être animal sous toutes ses formes. 

Nos responsabilités dans ce domaine en sortiront renforcées ainsi que l'image sociétale de notre profession. Pour que le praticien ait la possibilité d'assumer efficacement l'ensemble des missions actuelles et celles à venir, il est nécessaire que les modalités d'application puissent s'harmoniser facilement avec les exigences de ses activités professionnelles. 

* Afvac : Association française des vétérinaires pour animaux de compagnie.

** Avef : Association vétérinaire équine française.

*** CNOV : Conseil national de l'Ordre des vétérinaires.

**** SNGTV : Société nationale des groupements techniques vétérinaires.

***** SNVEL : Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1538

Envoyer à un ami

Mot de passe oublié

Reçevoir ses identifiants