Phytothérapie : « De plus en plus de propriétaires sont à la recherche de solutions naturelles pour soigner leur animal »

Seuls les vétérinaires ont le droit de prescrire aux animaux un traitement de phytothérapie sous la forme soit d'un médicament bénéficiant d'une AMM, soit d'une prescription magistrale.

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Corinne DESCOURS-RENVIER

Thérapeutique

De plus en plus de propriétaires sont à la recherche de solutions naturelles pour soigner leurs animaux. La phytothérapie est une solution intéressante pour le praticien. Son efficacité dépend de la durée d'évolution de la maladie, de l'intensité des symptômes et des éventuels traitements de synthèse prescrits auparavant, qui sont susceptibles de contrebalancer ses effets. Mieux vaut recourir à la phytothérapie en première intention si le cas s'y prête. Il sera toujours temps de mettre en place un autre traitement en cas de besoin.

Le laboratoire Wamine a organisé une conférence en ligne, en janvier, consacrée à l'utilisation de la phytothérapie et des solutions naturelles de santé chez les animaux. Notre confrère Claude Faivre, consultant en phytothérapie clinique individualisée, a partagé son expérience dans ce domaine.

D'un point de vue étymologique, le terme phyton vient du grec et signifie végétal. La phytothérapie correspond donc à un « traitement par les plantes ».

« Ayant eux-mêmes recours à la phytothérapie, de plus en plus de propriétaires sont à la recherche de solutions naturelles pour soigner leur animal », explique Claude Faivre. « Ils n'osent toutefois pas forcément aborder la question avec leur vétérinaire ».

Notre confrère estime pourtant que de nombreux praticiens, lassés de jouer les « pompiers », sont prêts à envisager de nouvelles approches sans toujours oser franchir le pas...

Penser et soigner autrement

« Avant de se lancer, il est essentiel de bien comprendre la différence entre phytothérapie et médecine conventionnelle », souligne le conférencier. « Les molécules de synthèse traitent un symptôme alors que la phytothérapie préfère aborder le patient dans sa globalité. Elle vise plutôt à restaurer l'équilibre initial de l'organisme ».

A titre d'exemple, si la prednisolone limite l'inflammation en cas d'hépatite, les lésions hépatocytaires vont persister après guérison. A contrario, certains principes actifs du Desmodium, une plante de la famille des Fabaceae, participent à la régénération des lobules du foie.

Pratique reconnue par l'OMS

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) reconnaît la légitimité des médecines traditionnelles, dont la phytothérapie, en tant que « somme des connaissances, des compétences et des pratiques fondées sur les théories, les croyances et les expériences propres à différentes cultures, qu'elles soient explicables ou non, utilisées dans le maintien de la santé et la prévention, le diagnostic, l'amélioration ou le traitement des maladies physiques et mentales »1.

En France, si le Conseil national de l'Ordre des vétérinaires n'admet pas explicitement l'utilisation de la phytothérapie, il ne l'assimile toutefois pas aux médecines « non conventionnelles », dont l'efficacité est sujette à caution.

« Le recours à la phytothérapie n'est donc pas en contradiction avec le Code de déontologie », rassure Claude Faivre. « L'article R242-33 alinéa I en particulier précise que « l'exercice de l'art vétérinaire est personnel » et que « chaque vétérinaire est responsable de ses décisions et de ses actes ». Et notamment de ses choix thérapeutiques ! ».

Des traitements personnalisés

Avant de mettre en place un traitement, Claude Faivre insiste sur l'importance de réaliser un examen clinique soigné, en prenant le temps de rechercher la cause de rupture de l'homéostasie de l'organisme, sans se focaliser sur les symptômes ayant motivé la consultation. « Il faut aussi s'assurer que l'état général de l'animal est suffisamment bon pour lui permettre de retrouver son équilibre à l'issue du traitement », ajoute le conférencier.

Seuls les vétérinaires ont le droit de prescrire aux animaux un traitement de phytothérapie sous la forme soit d'un médicament bénéficiant d'une AMM2, soit d'une prescription magistrale.

Le choix de la ou des plantes qui vont être utilisées pour le traitement dépend des molécules qu'elles contiennent (totum synergique), de leur tropisme pour un organe ainsi que de leur mode d'action (antibactérienne, immunomodulatrice et/ou adaptogène3). Claude Faivre rappelle par ailleurs la nécessité de toujours recueillir le consentement éclairé du propriétaire de l'animal, une étape encore trop souvent négligée.

Action rapide, surtout en première intention

Contrairement aux idées reçues, l'action de la phytothérapie est généralement rapide. Son efficacité dépend toutefois de la durée d'évolution de la maladie, de l'intensité des symptômes et des éventuels traitements de synthèse prescrits auparavant, qui sont susceptibles de contrebalancer ses effets.

« Mieux vaut donc recourir à la phytothérapie en première intention si le cas s'y prête », précise Claude Faivre. « Il sera toujours temps de mettre en place un traitement plus « agressif »en cas de besoin ».

Enfin, pour faciliter l'observance du traitement, mieux vaut que tous les membres de l'équipe soignante soient sensibilisés à la phytothérapie, y compris les auxiliaires vétérinaires, dont les conseils vont aider les clients à respecter les recommandations du praticien.

Un traitement associant phytothérapie et molécule de synthèse

Pour illustrer son approche, notre confrère a présenté le cas d'un chiot carlin âgé de huit mois souffrant de perte de poils sur les antérieurs. Les lésions, non prurigineuses, évoluent depuis plus d'un mois. La mère et deux autres chiots de la portée sont également atteints.

Les traitements précédents (antibiotiques per os et shampooings à la chlorhexidine) se sont révélés inefficaces.

Lors de la consultation, des zones d'alopécie sont observées sur la face supérieure des doigts, accompagnées de dépilations diffuses sur les membres antérieurs, le poitrail et les babines.

Un raclage cutané révèle la présence de Demodex.

Comme il n'existe pas de plante médicinale active contre les parasites intrafolliculaires, un traitement à base d'amitraze est instauré (application locale à la concentration de 0,025 %, deux fois par semaine pendant un mois).

« Le parasite induisant une immunosuppression chez son hôte, la phytothérapie est intéressante en parallèle pour aider le chiot à restaurer son équilibre», explique Claude Faivre.

Face au refus du propriétaire de donner des préparations liquides à son animal, notre confrère a choisi d'associer deux compléments alimentaires, Floréquilibre ND qui contient des probiotiques (1 à 2 gélules/jour minimum selon le poids et l'intensité de la dysbiose pendant un mois) et Vitalité ND à base de plantes4 (1 comprimé/jour/5 kg pendant un mois)5.

Après un mois et demi de traitement, les poils ont repoussé et plus aucun parasite n'est mis en évidence. Le traitement est poursuivi avec succès pendant deux mois, à raison de cures de Floréquilibre ND et Vitalité ND15 jours par mois.

1 Source OMS : www.who.int/fr/news-room/questions-and-answers/item/traditional-medicine.

2 AMM : autorisation de mise sur le marché.

3 Augmentant les capacités d'adaptation d'un organisme (action sur le stress, la croissance...).

4 Andrographis paniculata, Rhodiola rosea, Siberian ginseng et vitamine D3.

5 Les probiotiques sont soumis à enregistrement auprès de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) ; les phytocomplexes sont considérés comme des aliments complémentaires bien que le dosage et l'utilisation de certains demandent une parfaite collaboration vétérinaire/ASV pour le conseil au comptoir.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1700

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