Peut-on remplacer les tests sur les animaux dans le cadre de la réglementation ?
Mercredi 30 Mars 2022 Vie de la profession 43620Il existe désormais au XXIe siècle des technologies qui n'existaient pas auparavant.
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André MENACHE
BSc(Hons) BVSc MRCVS EBVS
European Veterinary Specialist in Animal Welfare Science
Ethics and Law Member of European College of Animal Welfare and Behavioural Medicine
Tribune libre
Tester des médicaments vétérinaires sur des animaux paraît logique mais quid de tester sur des animaux des médicaments destinés à l'Homme ? On découvre que les exigences techniques pour l'enregistrement de tout médicament à l'usage humain, ainsi que l'obligation de recourir aux tests sur des animaux pour mieux protéger les êtres humains, trouvent leurs origines dans le procès des médecins, à Nuremberg, après la fin de la seconde Guerre Mondiale, en 1946-1947.
En 2004, la FDA (la haute autorité de sécurité sanitaire aux Etats-Unis) constate que, sur dix médicaments ayant passé avec succès les tests requis sur des animaux, neuf échoueront au cours des essais sur l'Homme, dits essais cliniques (par absence d'efficacité ou présence d'effets secondaires non identifiés chez les animaux). Signalons que l'utilisation des animaux dans le cadre de la réglementation représente 20-25 % de l'ensemble des expériences pratiquées sur les animaux.
Organes sur puce
Il existe désormais au XXIe siècle des technologies qui n'existaient pas auparavant : organes sur puce, cellules souches pluripotentes, cultures cellulaires humaines en 3D, pour en nommer quelques-unes. Ces technologies doivent viser un taux de fiabilité de 85 à 90 % pour être acceptées au niveau réglementaire, ce qui dépasse largement les capacités du modèle animal. Signalons ici le fait que les tests sur des animaux n'ont jamais eu à subir un tel processus de validation par rapport à la santé humaine.
Pour le docteur Donald Ingber, directeur et fondateur du Wyss Institute for Biologically Inspired Engineering de l'université de Harvard, les organes sur puce d'origine humaine sont habilités à remplacer les tests sur les animaux pour le développement de médicaments et la médecine personnalisée. En l'occurrence, l'organe sur puce a été nommée l'une des 10 meilleures technologies émergentes par le Forum économique mondial.
Cependant, la réglementation évolue très lentement. Comble de l'ironie, l'industrie pharmaceutique se sert parfois de ces technologies innovantes mais uniquement en phase préclinique et toujours avant de passer aux tests réglementaires sur animaux.
Vu qu'il s'agit de changer la réglementation pour remplacer les tests sur des animaux par des méthodes adaptées pour la santé humaine, il faudra passer par le Parlement. Dans un premier temps, le Parlement pourrait constituer une commission d'enquête parlementaire ou, à minima, une mission d'information. Soyons prêts à nous lancer dans le débat ! ■