Petit Paysan , grande femme vétérinaire ?
Lundi 5 Mars 2018 Vie de la profession 29044La 43 e cérémonie des Césars, interminable séance annuelle d'auto-célébration cinématographique, a le mérite en 2018 de confirmer la qualité du film Petit paysan .
Plutôt que de remercier ses parents de l'avoir fait si beau et si intelligent, le réalisateur a choisi de se servir de la tribune offerte pour inciter le monde des éleveurs à retrouver sa fierté.
Dans ce film, le jeune éleveur passionné par ses vaches, confronté à un risque sanitaire majeur, a pour soeur une vétérinaire, incarnée à l'écran par Sara Giraudeau, elle aussi récompensée pour ce second rôle.
A la sortie du film, cet automne, nous étions déjà nombreux à être frappés par la justesse de ses gestes et la rare vraisemblance de ses répliques. La reconnaissance des Césars confirme notre sentiment.
Au-delà de la réussite du film et de sa juste mise en lumière de la réalité des éleveurs, le ressenti de l'éleveur lors de la survenue d'une maladie hémorragique mystérieuse dans son troupeau, nous interroge, comme sa soeur vétérinaire, sur les choix opérés au nom de la santé publique.
La culture de l'élimination totale, tant vantée dans la lutte contre les épizooties, est aujourd'hui inapplicable au regard du respect dû aux animaux.
Les éleveurs confrontés à l'ESB dans les années 2000 avaient déjà fort justement souligné leurs incompréhensions de l'abattage total appliqué au seul nom du principe de précaution.
Les risques auxquels est confronté l'élevage aujourd'hui relèvent le plus souvent d'une gestion complexe et adaptative. La boîte à outils de cette gestion doit faire appel à des solutions mixtes d'élimination et de protection. L'option stamping out n'en fait plus partie.
La liste des dangers est plus longue que les plaies bibliques de l'Egypte et la lutte spécifique contre chacun est un défi peu propice aux schémas simplificateurs. La présence du loup, qui se moque des frontières, la brucellose des bouquetins, en sont des illustrations.
Sara Giraudeau est dans Petit paysan confrontée au dilemme du respect d'une obligation sanitaire face à la détresse et aux doutes légitimes de son frère éleveur. Comme nous tous, elle choisit l'intérêt général.
Les femmes vétérinaires ont trouvé dans cette " phénomène " une juste incarnation de la réalité professionnelle. Cela faisait longtemps que notre métier n'avait pas bénéficié d'une aussi juste exposition et cela fait du bien. P.B.