Mpox : risque de transmission de l'Homme à l'animal exceptionnel mais à prendre en compte
Mercredi 28 Août 2024 Sciences 51366A juillet 2024, aucun cas d'infection par le Mpox n'a été confirmé chez les animaux domestiques courants, tels que les chiens et les chats, au cours de l'épidémie mondiale actuelle ou des épidémies passées.
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Jeanne BRUGÈRE-PICOUX
Professeur honoraire de l'école vétérinaire d'Alfort
Académie nationale de médecine
Académie vétérinaire de France
Une seule santé
S'il n'existe pas encore de preuve solide suggérant que les animaux de compagnie traditionnels, tels que les chiens ou les chats, soient sensibles à l'infection par le Mpox (anciennement appelé variole du singe), il convient de rester vigilant et d'appliquer une approche « Une seule santé » pour enquêter sur la propagation potentielle d'infections humaines aux animaux.
L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a qualifié l'épidémie de Mpox (anciennement appelé variole du singe), qui sévit dans une dizaine de pays d'Afrique depuis le début de l'année, d'« urgence de santé publique de portée internationale ». En cause, un nouveau variant plus transmissible et dangereux.
En Europe, un premier cas a été détecté à Stockholm et, en Asie, au Pakistan1.
Lors de l'émergence hors Afrique, nous avions rédigé un communiqué de la Plateforme de communication rapide de l'Académie nationale de médecine (ANM) sur ce sujet dès le 8 juillet 2022 pour alerter sur les modes particuliers de transmission de ce virus chez l'Homme. Le risque est resté lié à des transmissions interhumaines et non zoonotique.
Risque zoonotique de l'animal à l'Homme observé une fois
Si nous nous limitons au domaine vétérinaire, l'origine animale du Mpox, bien que suspectée dans l'historique de cette maladie actuelle, n'a été observée principalement que dans l'épisode très connu des contaminations par le Mpox aux Etats-Unis en 2003 liées à une importation de rats de Gambie (d'où l'interdiction d'importation de rongeurs africains dans de nombreux pays depuis).
Il ne faut pas oublier l'article trop rapidement publié dans le Lancet2 et repris dans les médias sur la transmission du Mpox de l'Homme au chien et jamais démenti par la revue malgré une demande pour ce démenti du laboratoire de notre confrère Stephan Zientara, membre de la section des sciences vétérinaires de l'ANM d'où un communiqué de l'Anses3. Il n'existe à notre connaissance qu'un autre cas brésilien de transmission du virus au chien4.
On ne sait pas si la détection de l'ADN viral dans ces deux cas est le résultat d'une infection par le Mpox chez ces animaux ou le résultat d'une contamination environnementale due à un contact étroit avec des humains infectés.
Un article très récent paru dans Emerg Inf Dis5 confirme que la transmission est essentiellement interhumaine.
A juillet 2024, aucun cas d'infection par le Mpox n'a été confirmé chez les animaux domestiques courants, tels que les chiens et les chats, au cours de l'épidémie mondiale actuelle ou des épidémies passées.
Rappeler les mesures d'hygiène aux propriétaires
Le risque zoonotique reste donc exceptionnel mais justifie peut-être de rappeler les mesures d'hygiène que les propriétaires d'animaux de compagnie méconnaissent, notamment les animaux dormant dans les chambres comme l'avait souligné l'un de nos membres vétérinaires à titre étranger à l'ANM, Bruno Chomel, qui était professeur à Davis6.
Actuellement, l'épidémie liée au Mpox notamment avec ce variant plus dangereux reste très spécifiquement humaine (et souvent liée à des contacts étroits) et l'on peut être rassurant dans ce domaine sur le risque zoonotique avec les animaux de compagnie.
Pour Morgan et al.5, il n'existe pas encore de preuve solide suggérant que les animaux de compagnie traditionnels, tels que les chiens ou les chats, soient sensibles à l'infection par le Mpox de clade IIb.
Étant donnée la forte probabilité d'exposition chez la plupart de ces animaux, la rareté des preuves indiquant une infection pourrait indiquer une résistance à l'infection.
Néanmoins, pour empêcher une nouvelle propagation virale et une éventuelle évolution et création de nouvelles zones endémiques, lors des urgences de santé publique causées par des maladies zoonotiques émergentes, il faut appliquer une approche « Une seule santé » pour enquêter sur la propagation potentielle d'infections humaines aux animaux, y compris aux animaux de compagnie. ■
1 C Raina MacIntyre . Quels moyens l'OMS met-elle en oeuvre pour prévenir une pandémie (The conversation-17/8/2024).
2 Seang S, Burrel S, Todesco E, Leducq V, Monsel G, Le Pluart D, et al. Evidence of human-to-dog transmission of monkeypox virus. Lancet. 2022 ; 400:658-9.
3 www.anses.fr/fr/content/variole-du-singe-quel-risque-de-diffusion-aux-animaux-de-compagnie.
6 Chomel B.B., Sun B., Zoonoses in the Bedroom. Emerg Infect Dis., 2011 ; 17(2):167‑72.