Management : un point central du bien-être des auxiliaires vétérinaires qui conditionne leur maintien en poste

La reconnaissance par les vétérinaires a un réel impact sur la qualité de vie au travail des auxiliaires.

© David Quint

Théo DELSARTE

Enquête

La Dépêche Vétérinaire a participé, avec APForm* et ASVInfos.com, à la diffusion d'une enquête sur la qualité de vie au travail des auxiliaires vétérinaires et les facteurs l'influençant. Il apparaît que le management, et notamment la communication au sein de l'équipe et avec les vétérinaires, l'organisation du travail ou encore l'ambiance dans la clinique, sont des points clés qui conditionnent le bien-être des auxiliaires sur leur lieu de travail et participe à leur envie de rester à leur poste.

Dans une étude réalisée outre-Manche sur la qualité de vie au travail (QVT) des Vet Nurses (VN), homologues des auxiliaires vétérinaires (AV) français, ceux-ci avaient témoigné d'un mal-être grandissant dans l'exercice de leur profession. Le taux de fidélisation des VN est faible, notamment lié au manque de reconnaissance et au salaire insuffisant. A la publication des résultats de cette enquête, des AV ont souligné qu'une étude similaire serait la bienvenue en France. C'est maintenant chose faite.

Plus de 1 000 participants se sont ainsi exprimés : le questionnaire a été ouvert du 13 avril au 4 mai et comptait 44 questions relatives à la QVT en structure vétérinaire. Il a été relayé sur de nombreux réseaux et notamment les groupes Facebook dédiés à la profession, les réseaux sociaux de La Dépêche Vétérinaire et d'APForm* et le site ASVInfos.com avec l'aide de sa fondatrice Anne-Marie Lebis.

Evaluation générale du bien-être au travail

Les AV ont pu répondre à un questionnaire leur permettant de s'exprimer sur l'ambiance, la reconnaissance, la rémunération, la communication ou encore leur perception du salaire. La note globale est rassurante : les AV évaluent leur qualité de vie globale au travail à 3,9 sur 6.

Cette note a ensuite été comparée aux différentes questions portant sur le profil des auxiliaires sondés. Ainsi, l'âge, la longévité dans l'entreprise et la taille de la structure ne semblent pas influer.

A contrario, les AV ont pu s'exprimer sur les facteurs qui entraînent une répercussion sur leur bien-être sur leur lieu de travail (figure n° 1).

Finalement, l'ambiance est la principale préoccupation des AV concernant leur qualité de vie au travail. La reconnaissance et l'organisation forment les deux autres critères principaux. La catégorie « autre »comprend une combinaison de plusieurs choix.

La rémunération, bien que citée en faible occurrence comme étant la principale source influençant la QVT, est le point noir de cette enquête (figures n° 2 et 3). En effet, plus de 85 % des auxiliaires estiment être insuffisamment, voire très insuffisamment, rémunérés. Cela entraîne un constat plus alarmant : le salaire est la première raison évoquée par les auxiliaires quand on leur demande de citer le point négatif principal de leur travail.

Autre point important : plus d'un auxiliaire sur 5 envisage de quitter la profession dans les 5 années à venir et près d'un sur 3 compte changer de poste dans le même laps de temps (figure n° 4). Cela témoigne d'un faible taux de fidélisation de la profession, la raison principale évoquée par le fait de partir étant la rémunération trop faible.

Ambiance en clinique vétérinaire

Concernant l'ambiance en clinique vétérinaire, le retour des auxiliaires est assez clair : 72 % d'entre eux estiment que l'ambiance générale dans leurs structures est bonne (figure n° 5). Ce chiffre est proche des 71 % déclarant travailler dans un environnement agréable.

Cependant, seuls 32 % répondent faire des activités organisées par la clinique en dehors du temps de travail. Or ces auxiliaires évaluent leur bien-être au travail à 4,4/6, contre 3,6 pour ceux qui répondent le contraire. Ainsi, il serait pertinent pour les associés de cliniques d'organiser des sorties hors cadre professionnel afin de souder l'équipe et d'induire indirectement une meilleure vision des auxiliaires de leur travail.

D'autres corrélations ont également pu être faites : la rareté des conflits, une bonne reconnaissance de la part des vétérinaires et une communication fluide entraînent une meilleure évaluation de l'ambiance.

Au contraire, une mauvaise ambiance entraîne, sans surprise, un plus fort taux de volonté de départ du métier. La reconnaissance des clients, quant à elle, n'influe pas sur la perception de l'ambiance. Ainsi, la gestion en interne est primordiale pour garantir une QVT correcte.

Autre constat : la perception de la rémunération n'influe pas sur l'ambiance générale en clinique, qui semble plus dépendre des interactions humaines, notamment avec les vétérinaires.

Reconnaissance du métier d'AV

L'estime des autres envers les auxiliaires a été évaluée par ces derniers en provenance de différentes catégories de l'environnement professionnel et privé. Le résultat est sans appel : si les auxiliaires considèrent, pour plus de 85 % d'entre eux, que la reconnaissance par les autres AV, les stagiaires et livreurs, ou par leur milieu privé est bonne, seuls 59 % répondent que l'estime des vétérinaires envers eux l'est également et 63 %, que l'estime des clients est bonne (figure n° 6).

Le sondage a révélé que la reconnaissance par les vétérinaires avait un réel impact sur la QVT des AV, contrairement à la reconnaissance des clients qui n'influe pas sur le bien-être de ces derniers. Cela souligne l'importance de remercier ses AV de les encourager et de reconnaître leur travail.

Cela passe notamment par plus de formules de politesse et une rémunération plus importante : il a été montré que les auxiliaires répondant être payés au-dessus de la convention estimaient être mieux reconnus par les vétérinaires de l'équipe. De même, si ces derniers leur proposent des formations, cela montre leur volonté de les faire progresser et de valoriser leurs compétences.

Communication au sein des équipes

Si la communication entre AV est facile pour 80 % des interrogés, elle ne l'est que pour 60 % d'entre eux quand il s'agit d'échanger avec les vétérinaires. De plus, 51 % estiment que les conflits dans la clinique sont fréquents. Pour les réduire, un meilleur management d'équipe pourrait être approprié. En effet, les conflits émanent souvent de situations délicates en clientèle et seuls 35 % des auxiliaires déclarent faire une analyse des situations problématiques a posteriori pour trouver des solutions et les éviter à l'avenir (figure n° 7).

Une communication fluide et transparente entraîne forcément une meilleure évaluation de la QVT et ce, surtout si les vétérinaires se montrent disponibles et respectueux envers les auxiliaires (figure
n° 8). Il a aussi été montré qu'une faible fréquence de conflits et qu'un soutien des vétérinaires lors d'erreurs des auxiliaires entraînaient un stress moins important et donc une QVT meilleure (figure n° 9).

Organisation du travail

Les auxiliaires ont souvent mis en avant une charge de travail importante au cours de l'enquête. En effet, 55 % d'entre eux estiment avoir une mauvaise répartition de l'intensité sur leur journée de travail et seuls 56 % disent avoir un bon équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle (figure n° 10). Cela est notamment relié au fait que près de la moitié des sondés déclarent rester fréquemment au-delà de leurs horaires de travail.

Cependant, cet équilibre n'est pas dépendant des critères de vie familiale (en couple, célibataire, avec ou sans enfant...) ni du fait de travailler dans plusieurs structures.

Ainsi, une meilleure organisation et un respect des auxiliaires, passant notamment par une anticipation de l'information sur leurs horaires, entraînent une sensation de bien-être au travail. Un respect des temps de pause et des horaires implique directement un équilibre pro-perso correct et un épanouissement au quotidien (figure n° 11).

Formation continue des auxiliaires

Enfin, le questionnaire s'est intéressé à l'influence ou non de la politique de formations sur la QVT des AV (figure n° 12). Il a été établi que le fait que ces derniers cherchent des formations et les financent par eux-mêmes n'induisaient pas de mal-être au travail.

Cependant, si c'est l'employeur qui propose les formations, qui les finance et qui permet aux auxiliaires de les réaliser sur leur temps de travail, cela induit un bien-être plus important des AV qui estiment alors avoir une meilleure reconnaissance de la part de l'équipe vétérinaire. Toutefois, seuls 40 % répondent que leurs employeurs sont acteurs dans le processus de formation. Pour améliorer le ressenti de reconnaissance, le développement des possibilités de formation serait donc un bon moyen.

Finalement, le constat est moins alarmant qu'au Royaume-Uni, bien qu'une part des AV interrogés fassent part d'un profond mal-être. Ce dernier peut et doit être géré en interne par l'équipe vétérinaire.

Une meilleure gestion du management, passant tout d'abord par un dialogue sain entre les personnes de l'équipe, induira une meilleure estime de soi chez les auxiliaires. Une reconnaissance peut aussi passer par une valorisation via des formations ou un salaire supérieur à la convention.

Ensuite, l'organisation se doit d'être la plus claire possible afin de respecter la vie privée des auxiliaires.

Enfin, une bonne ambiance doit être instaurée pour motiver les auxiliaires qui déclarent faire un métier passion.

Pour conclure, la qualité de vie au travail apparaît comme un enjeu majeur dans les structures vétérinaires pour fidéliser son personnel auxiliaire (figure n° 13) et favoriser son épanouissement.

Cette enquête a été menée dans le cadre de la réalisation d'une thèse vétérinaire. Elle sera publiée d'ici peu et accessible en ligne, intitulée   « Etude de la qualité de vie au travail des auxiliaires vétérinaires ».

* APForm : AnimalPro Formation. 

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1669

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