Maladies infectieuses : la grande accélération

Le renard joue un rôle clé dans les chaînes trophiques et sa destruction systématique pourrait être un élément du déséquilibre des écosystèmes ...

© Jean-François Silvain

Voici le deuxième article de la série traitant des variations actuelles de la biodiversité. Il concerne l'impact de la crise actuelle de la biodiversité sur l'émergence de certaines pathologies infectieuses.
Les maladies, dont les zoonoses, sont des processus écologiques naturels au sein des écosystèmes. Tous les êtres vivants ont co-évolué avec leurs pathogènes pour s'y adapter.
Certains processus ont même conduit à leur intégration sous forme de fragments d'ADN dans leur hôte. Notre génome s'est ainsi construit en incorporant des fragments d'ADN issus d'épidémies anciennes. C'est le cas de la télomérase, une enzyme à l'origine virale qui a été intégrée au génome humain et qui participe au phénomène d'apoptose cellulaire indispensable à notre survie. C'est aussi le cas des syncytines, des glycoprotéines d'enveloppe codées par des gènes issus de rétrovirus et qui permettent le développement placentaire chez les mammifères. L'éradication complète des pathogènes, en plus d'être souvent très coûteuse, peut donc ne pas avoir que des effets positifs.
Par ailleurs, d'autres parasites ou agents pathogènes sont susceptibles d'occuper les niches laissées vacantes. Il en va de même des vecteurs. Tenter de réduire des populations ou éradiquer une espèce pour réduire l'incidence d'une maladie zoonotique constitue des actions que la complexité du monde vivant, et plus spécifiquement des processus écologiques, rend très aléatoires.
La majorité des germes émergents ou ré-émergents ces dernières décennies ont été des virus (a contrario des bactéries, protozoaires ou helminthes) grâce à leurs forts taux de reproduction et leurs capacités à s'adapter à de nouveaux environnements.
Parallèlement, le nombre d'épidémie dues aux maladies infectieuses augmente depuis la seconde moitié du 20e siècle, et ce malgré une prise en charge sanitaire qui s'améliore et parvient à stabiliser, voire à diminuer le nombre de morts. Ainsi, en France, entre les années 1940 et 2000, le nombre de maladies infectieuses émergentes a été multiplié par quatre et en plus du rôle déjà connu de la démographie, de l'urbanisation et de la mondialisation des échanges, la corrélation avec la biodiversité est bien établie.
Examiner comment la biodiversité, et notamment les équilibres entre espèces au sein des écosystèmes, peuvent nous protéger des maladies infectieuses est un nouveau paradigme qui fait l'objet de recherches récentes et encore peu nombreuses.

Article paru dans La Dépêche Technique n° 172

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