Maillage dans l'Allier : les vétérinaires inquiets écrivent à la préfecture

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Joëlle NIGOND

Présidente du SDVEL* 03

Laurent PLANEIX

Président du SRVEL AuRA**

Tribune libre

Le maillage vétérinaire rural commence à montrer des zones en voie de désertification dans l'Allier. Notre consoeur Joëlle Nigond et notre confrère Laurent Planeix demandent au préfet une concertation pour pouvoir assurer les opérations de prophylaxie dans de bonnes conditions. L'urgence est de maintenir suffisamment de structures pour assurer l'encadrement sanitaire, médical et du bien-être de tous les cheptels.

Depuis trois ans, faute d'entente en commission bipartite, l'arbitrage préfectoral rendu avait pénalisé les vétérinaires. Devant ce contexte négatif et le dépit en résultant, Joëlle Nigond, présidente du SDVEL* 03, a sollicité une rencontre avec Monsieur le préfet afin d'exposer l'argumentation des vétérinaires, désavoués par leur autorité de tutelle.

L'arrivée d'un nouveau préfet, Jean-François Treffel, ouvrait des espoirs de dialogue. L'an dernier, Madame la préfète n'était pas disponible pour échanger, c'était le secrétaire général qui avait reçu nos doléances.

Mercredi 20 octobre, Joëlle Nigond, Anne-Catherine Bernard, présidente du GTV 03, et Laurent Planeix, président du SRVEL** AuRA, constituaient la délégation en quête d'explications sur les arbitrages défavorables.

Unanimes, les représentants de la profession vétérinaire ont exprimé le ressenti de tous : malgré des concessions et le souhait d'un dialogue positif et équilibré, des efforts ont été imposés aux vétérinaires sans contreparties alors que le maillage vétérinaire rural commence à montrer des zones en voie de désertification.

Comment se projeter dans dix ans ?

Plus de la moitié des vétérinaires libéraux exerçant en rurale ou mixte dans l'Allier ont plus de 50 ans, comment se projeter dans dix ans dans un département traditionnel d'élevage ? L'activité rurale souffre d'un défaut d'attractivité reconnu, les décisions préfectorales l'accentuent paradoxalement. Elles envoient un ressenti dévalorisant sur l'engagement des vétérinaires dans la lutte et la veille sanitaire auprès de nos élevages.

Informé par les représentants du GDS et de la chambre d'agriculture, Monsieur le préfet a évoqué les tarifs des départements limitrophes inférieurs aux nôtres. Cet argument tient-il devant la qualité du travail des vétérinaires sanitaires depuis des décennies auxquels il n'était pas envisageable d'appliquer une politique de moins-disant inappropriée dans un tel contexte ?

Il admet que les deux professions - agriculteur et vétérinaire - ont des difficultés et souhaite que nous arrivions à nous entendre pour l'an prochain sans avoir recours à la préfecture. Pour cela, la DDETSPP est chargée de mettre en place des groupes de travail de 6 à 10 personnes réunissant des agriculteurs, pas forcément des élus de la chambre d'agriculture, des vétérinaires et des agents de la DDETSPP.

Installer un échange constructif

L'objectif est d'installer un échange constructif pour arriver en bipartite l'été prochain avec des accords équitables. Cela commencerait dès le mois de janvier, les groupes pourraient auditionner des personnalités souhaitant témoigner. Puis une deuxième phase d'échanges permettra de définir les termes d'accords en considérant les années précédentes et l'avenir du milieu rural et de l'activité vétérinaire dont il a besoin.

La concertation engagée avec la région Auvergne-Rhône-Alpes a été évoquée pour apporter des supports à la réflexion envisagée dans l'Allier.

Fort de son expérience en Mayenne où il était jusqu'en 2020, il propose de nous mettre en relation avec le conseil départemental pour attirer des jeunes vétos, en organisant par exemple une semaine d'accueil des étudiants vétérinaires sur le territoire pour visiter les cabinets vétérinaires et quelques exploitations, comme cela se fait en Mayenne.

Tous ont été favorables à ce genre d'action mais l'urgence est bien de maintenir suffisamment de structures pour assurer l'encadrement sanitaire, médical et du bien-être de tous nos cheptels.

Application de l'arrêté sans concertation

Concernant l'allègement de prophylaxie, il est bien conscient que sans arrêté ministériel avant le 1er novembre, la prophylaxie se fera comme les autres années.

Le 29 octobre, la préfecture s'est donné un délai supplémentaire de deux semaines pour attendre l'arrêté ministériel, que d'autres départements ont déjà repoussé à l'année prochaine pour en affiner l'application et permettre une campagne sur les bases des accords récents.

Dès la parution de l'arrêté, le 10 novembre 2021, il a été décidé une application immédiate, et sans concertation.

Les vétérinaires de l'Allier sont très inquiets et redoutent les conséquences de cette impréparation lors des prochaines opérations de prophylaxie dont les conditions de réalisation se trouvent modifiées. Des surcoûts seront probables et leurs compensations restent très incertaines. La qualité du service sera menacée.

Il est bien paradoxal de proposer un processus de conciliation fin octobre et de lancer sans négociations un allègement justifié épidémiologiquement, dans la précipitation, alors que la majorité des départements ont choisi de le reporter à l'année suivante, qui va ajouter une tension supplémentaire à notre maillage vétérinaire départemental, perçue très négativement par les professionnels de terrain.

A l'heure où les mesures nationales viennent pour tenter de le préserver avec la loi DADDUE, l'inquiétude grandit dans l'Allier.

* SDVEL : Syndicat départemental des vétérinaires d'exercice libéral.

** SRVEL : Syndicat régional des vétérinaires d'exercice libéral Auvergne-Rhône-Alpes.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1597

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