Le premier remplacement : « une expérience à vivre »
Mercredi 2 Septembre 2020 Vie de la profession 37047Selon Dimitri, sa principale motivation à chercher un remplacement a été sa soif d'apprendre.
© Dimitri Chaudron
Propos recueillis par Pierre-Louis HELMREICH
Exercice
Les études vétérinaires ont réservé à chacun beaucoup de découvertes et il a fallu relever de nombreux défis qui peuplent aujourd'hui le quotidien des confrères praticiens. La Dépêche Vétérinaire vous propose de replonger dans le défi que représente le premier remplacement, étape préalable à l'acquisition de l'autonomie en pratique que Dimitri Chaudron, étudiant entrant en 5e et dernière année d'études vétérinaires, nous fait partager.
■La Dépêche Vétérinaire : Quelles étaient les motivations qui t'ont poussé à chercher un remplacement ?
Dimitri Chaudron : Je dirais en premier lieu : la soif d'apprendre. En effet, même si j'ai maintenant accompli six ans d'études supérieures dans les sciences du vivant (sans rattrapage), je suis toujours à la recherche de la petite technique, du détail croustillant qui fera la différence le jour où un animal, dont la vie m'est confiée, me regardera d'un air de dire « Sauve moi humain, je te fais pleinement confiance ».
■ D.V. : Quelles étaient tes critères de recherche ?
D.C. : Avant tout, la bonne ambiance. De franches rigolades ont été au menu de chaque journée, ce qui m'a permis de donner le meilleur de moi-même. Cependant, un esprit sérieux et attentionné était porté à chaque animal. Nous avons tout de même une importante responsabilité.
■ D.V. : Quels objectifs t'étais-tu fixés ? Les as-tu réalisés ?
D.C. : J'ai commencé ce remplacement (ou plutôt « rempla' » comme on dit) avec en tête mon objectif ultime : la TPLO*. L'occasion ne s'est malheureusement pas présentée. Cependant, je réalise maintenant les vaccins sous-cutanés avec assurance. C'est un début.
■D.V. : Selon toi, qu'est-ce que ce remplacement t'a apporté ?
D.C. : Si vous me permettez une pointe d'humour, je répondrai la gale sarcoptique. En effet, je n'ai malheureusement pas pris assez de précautions face à ce chien qui, à première vue, venait pour un banal prurit. Cette expérience, qui plus est dans ce contexte de pandémie, m'a rappelé notre vulnérabilité face au monde dangereux des pathogènes et des zoonoses et m'a apporté une preuve de plus que l'on pèse dans le combat qu'est le maintien de la santé publique. Restons sur nos gardes.
■ D.V. : Comment t'es-tu intégré au sein de l'équipe ?
D.C. : Honnêtement, je pense les avoir amadoués grâce à mes talents culinaires, sans trop me vanter. En tant que nouveau, j'ai dû inviter toute l'équipe à manger chez moi. J'ai même hérité d'un surnom puisque l'équipe m'appelle dorénavant « Chaudron magique » . Je ne connaissais pas cette tradition du monde vétérinaire mais, après tout, s'intégrer dans la bonne ambiance n'a pas de prix !
■ D.V. : Quelles étaient tes appréhensions avant de commencer ?
D.C. : J'avais peur de ne pas être à la hauteur et d'entacher la réputation de la clinique par mes erreurs. Pour ne rien vous cacher, j'en ai même fait un cauchemar la nuit d'avant. L'ensemble des polycopiés de mes quatre années d'école sous le bras, je suis arrivé tout penaud à mon premier jour. Heureusement, la sympathie, la patience et la pédagogie de l'équipe m'a fait prendre rapidement mes marques. Ma peur de l'inconnu est aujourd'hui de l'histoire ancienne.
■ D.V. : As-tu un moment particulièrement fort que tu aimerais partager ?
D.C. : Sans hésiter, le lundi 20 juillet. Un propriétaire entre dans la clinique en cherchant du regard une aide désespérée. Son chien, boitant au grade 5/5, a une de ses griffes littéralement recourbée dans la chair à vif du coussinet, ce qui était en train de lui lacérer les tissus. Ni une ni deux, je saisis un coupe griffe et libère le pauvre animal de l'emprise de la douleur. Le regard reconnaissant du propriétaire en disait long. C'est ce jour précis que j'ai pris conscience de la fierté que je pouvais avoir d'être vétérinaire. C'est une véritable passion pour moi depuis l'enfance.
■ D.V. : Quel retour général fais-tu sur cette expérience ?
D.C. : J'ai eu la chance d'avoir une approche de la médecine vétérinaire par le partage de mes futurs confrères et par ma propre expérience : « On apprend jamais mieux que par soi-même », après tout. Enfin, je voudrais dire aux jeunes qui n'osent pas toujours franchir le cap : lancez-vous, le remplacement est une expérience à vivre ! ■
* TPLO : Tibial Plateau Leveling Osteotomy.