Infection expérimentale avec le virus du Covid-19 : le chat serait plus sensible que le chien et le furet

Il a été possible de démontrer que le virus pouvait être transmis par la voie aérienne sur l'un des trois chats en contact avec les chats inoculés.

© Arvind Balaraman-Fotolia

Jeanne BRUGÈRE-PICOUX

Membre de l'Académie vétérinaire de France et de l'Académie nationale de médecine

Santé publique

Deux études récentes de contaminations expérimentales de chiens, chats et furets avec le virus Sars-CoV-2, effectuées avec de fortes doses de virus et un très faible nombre d'animaux, semblent démontrer une plus grande sensibilité des chats et des furets par comparaison avec le chien. D'autres tests sont néanmoins nécessaires, notamment chez les chats avec des doses différentes de virus, pour le vérifier.

L'éditorial de la revue Nature du 1er avril rapporte les résultats des travaux réalisés par une équipe chinoise de l'institut de recherche vétérinaire de Harbin* démontrant que l'on pouvait reproduire expérimentalement par inoculation intranasale l'infection par des virus Sars-CoV-2 chez des animaux pouvant être de compagnie ou de ferme (furets, chats, chiens, poulets, porcs et canards).

Il faut noter que dans ce document prépublié (n'ayant pas encore fait l'objet d'une validation), seul un petit nombre d'animaux a été inoculé avec de fortes doses de virus. 

Le virus a été détecté dans les premières voies respiratoires des furets qui n'ont pas présenté de symptômes importants ou une mortalité.

Transmission par voie aérienne

Cinq chats ont pu être infectés avec une excrétion virale dans les échantillons respiratoires et fécaux et une séroconversion. Il a été possible de démontrer que le virus pouvait être transmis par la voie aérienne sur l'un des trois chats en contact avec les chats inoculés.

Les trois chiens inoculés ont montré une très faible sensibilité à l'infection virale.

Enfin, les porcs, les poulets et les canards ne se sont pas révélés sensibles.

Rappelons que des études antérieures sur le Sras-CoV à l'origine du syndrome respiratoire aigu sévère (Sras) avaient déjà montré expérimentalement que les chats pouvaient être infectés et contaminer d'autres chats sans que l'on ait montré un rôle épidémiologique des chats dans ce syndrome.

Dans une seconde publication du 31 mars**, une équipe sud-coréenne rapporte l'inoculation expérimentale de furets avec de fortes doses de virus.

Contagiosité chez des furets

Chez ces furets, on a pu retrouver le virus dans les cavités nasales, la salive, l'urine et les fèces jusqu'à 8 jours suivant l'inoculation. Il a été aussi possible de démontrer une contagiosité chez des furets placés en contact direct dans la même cage que les furets inoculés.

Pour quelques furets en contact indirect car placés dans des cages séparées, on a pu aussi démontrer la possibilité d'une transmission par la voie aérienne.

Par comparaison avec les inoculations réalisées avec le Sars-CoV du Sras, les auteurs font remarquer que les aspects cliniques et les titres de virus dans les poumons sont plus faibles avec le Sars-CoV-2 mais que l'infection persiste plus longtemps chez l'animal, avec la possibilité d'un portage asymptomatique permettant la propagation du virus.

Rien d'alarmant pour les propriétaires

Le furet peut néanmoins être un modèle animal pour l'étude de l'infection par le Sars-CoV-2, comme dans le cas de plusieurs viroses respiratoires humaines (virus influenza ou parainfluenza, virus respiratoire syncytial, Sars-CoV-1).

Ce document prépublié ne concerne que 24 furets et n'a pas encore fait l'objet d'une validation.

D'autres tests sont nécessaires, notamment chez les chats avec des doses différentes de virus, pour vérifier la possibilité de cette transmission par contact. 

Ces résultats démontrent qu'il est inutile d'alarmer les propriétaires d'animaux de compagnie car le principal risque du Covid-19 est une transmission interhumaine mais il est recommandé aux personnes atteintes de Covid-19 de limiter le contact avec leurs animaux de compagnie, notamment en évitant de les caresser, en se faisant lécher et en partageant de la nourriture.

* Jianzhong Shi et al. Susceptibility of ferrets, cats, dogs, and different domestic animals to Sars-coronavirus-2. bioRxiv preprint 2020.03.30.015347v1.full.pdf

** Young-Il Kim et al. Infection and Rapid Transmission of SARS-CoV-2 in Ferrets. Journal pre-proof. CellPress.DOI: 10.1016/j.chom.2020.03.023.

Gros plan : Une autre enquête sérologique chez des chats

Une autre enquête sérologique (Elisa)*, publiée le 1er avril, a été réalisée en Chine chez des chats de Wuhan prélevés avant et après l'épidémie de Covid-19. Sur les 102 chats prélevés après l'épidémie, 15, soit 14,7 %, se sont révélés positifs, dont 11 avec des titres d'anticorps neutralisants variant de 1/20 à 1/1080, les taux les plus importants ayant été relevés chez les trois chats dont les propriétaires étaient Covid-19 positifs (1/360, 1/360 et 1/1080). Les autres chats étaient des chats errants ou présents dans des hôpitaux. Les chats témoins ayant été prélevés avant l'épidémie étaient négatifs.

* Zhang Q et al., Sars-CoV-2 neutralizing serum antibodies in cats : a serological investigation, https://urlz.fr/cjQT (bioRxiv: prépublication non validée).

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1524

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