Bien utiliser les médicaments antiprurigineux lors de poussée atopique chez le chien

Poussée atopique avec érythème important de la face, notamment des paupières, des babines et de la face ventrale du cou.

© Dermatologie ENVT

Marie-Christine CADIERGUES1, 2

Vincent BRUET3

Marion MOSCA4

Amaury BRIAND5

Patrick BOURDEAU6

Didier PIN3

Noëlle COCHET-FAIVRE5,7

1 Service de dermatologie, université de Toulouse, ENVT (31076 Toulouse)

2 INFINITy, université de Toulouse, Inserm, CNRS, UPS (31059 Toulouse)

3 Services de dermatologie spécialisée (49070 Beaucouzé, 56400 Brech, 44100 Nantes, 44120 Vertou)

4 Université de Lyon, VetAgro Sup, Interactions Cells Environment, UPSP 2016.A104 (69280 Marcy-l'Etoile)

5 Service de dermatologie, ENVA (94700 Maisons-Alfort)

6 Service de dermatologie, Oniris, université de Nantes (44307 Nantes)

7 UMR BIPAR, Laboratoire de santé animale (94700 Maisons-Alfort)

Dermatologie

Zoetis a mandaté un groupe de sept experts en dermatologie pour établir des recommandations sur l'usage des antiprurigineux chez le chien dans différentes situations et notamment en cas de dermatite atopique. Les lignes directrices qui en découlent conviennent à une grande majorité de cas sur la base d'une bonne pratique clinique.

Le prurit est défini comme une sensation désagréable qui provoque le désir de se gratter. La première indication d'utilisation de médicaments antiprurigineux (en ayant exclu les ectoparasites) est la dermatite atopique (DA).

Sept experts se sont réunis pour établir, sur la base d'une analyse bibliographique exhaustive et rigoureuse, les recommandations cliniques d'usage des antiprurigineux chez le chien dans différentes situations 1 . Ce qui est détaillé dans la suite de ce texte concerne uniquement l'usage des médicaments antiprurigineux avec AMM (glucocorticoïdes systémiques et topiques, antihistaminiques, ciclosporine A, oclacitinib, lokivetmab) lors de poussée de DA.

Le clinicien gardera en tête la nécessité préalable d'un diagnostic clinique après avoir éliminé les hypothèses parasitaires et infectieuses et la nécessité d'une prise en charge multimodale, avec notamment l'usage concomitants de topiques apaisants et/ou antimicrobiens, d'une alimentation adaptée et si possible un programme de désensibilisation.

La gradation de la recommandation (SoR) a été classée comme suit2 (A étant préférable à B lui-même préférable à C) :

A. recommandation basée sur des preuves cohérentes et de bonne qualité orientées vers le patient ;

B. recommandation fondée sur des données probantes orientées vers le patient, de qualité incohérente ou limitée ;

C. recommandation basée sur un consensus, une opinion, des études de cas ou des preuves orientées vers la maladie.

Les lignes directrices doivent toujours être interprétées comme des recommandations générales qui conviennent à une grande majorité de cas sur la base d'une bonne pratique clinique. Elles sont établies pour améliorer la qualité et la sécurité des soins mais elles n'ont pas pour but de décrire l'ensemble de la prise en charge d'une maladie et elles ne peuvent pas couvrir toutes les situations cliniques rencontrées dans la pratique courante.

Les glucocorticoïdes oraux (prednisolone, méthylprednisolone [SoR A], prednisone [SoR B]) et la dexaméthasone injectable [SoR C] sont efficaces pour le traitement des poussées de la DA du chien. Ils peuvent être administrés initialement à raison de 0,5-1 mg/kg (prednisolone) ou 0,4-1 mg/kg (méthylprednisolone) par jour [SoR A], en une ou deux administrations [SoR A], une dose qui est maintenue ou qui peut être diminuée après 3-7 jours [SoR B] en utilisant un protocole standard ou en fonction des résultats [SoR B]. Une réduction significative du prurit est obtenue rapidement, en quelques heures ou en quelques jours [SoR B].

Les glucocorticoïdes topiques (acéponate d'hydrocortisone [SoR C], triamcinolone [SoR C]) sont efficaces pour le traitement des poussées de la DA canine, en particulier pour les lésions localisées. Au moment de la rédaction du document synthétique (2022), le manque de données sur l'efficacité des glucocorticoïdes topiques au cours des deux premières semaines de traitement ne permet pas de formuler une recommandation au-delà de SoR C. Le schéma optimal est un traitement quotidien suivi d'une réduction de la fréquence d'application sur la peau en fonction des résultats [SoR C].

Les antihistaminiques ne sont pas recommandés pour le traitement des poussées aiguës graves de la DA [SoR A]. Cependant, comme leur action est dépendante de l'animal et souvent légère, qu'ils agissent relativement vite, qu'ils sont peu coûteux et ont peu d'effets secondaires, ils peuvent être utilisés pour les poussées légères de la DA [SoR C].

L'injection sous-cutanée de lokivetmab entraîne une amélioration significative du prurit entre quatre heures et 24 heures après l'injection [SoR A] et est efficace pour le traitement des poussées de la DA chez le chien [SoR A]. Les réductions du score de prurit et du score lésionnel étaient significatives 28 jours après une injection [SoR B]. La dose minimale de lokivetmab utilisée en Europe est de 1 mg/kg.

En raison de la réduction rapide et efficace du prurit, l'oclacitinib [SoR A] est efficace pour le traitement des poussées avec une efficacité obtenue en quelques heures [SoR B] ou quelques jours [SoR A]. La dose d'oclacitinib est de 0,4-0,6 mg/kg deux fois par jour par voie orale pendant 14 jours puis réduite à 0,4-0,6 mg/kg une fois par jour [SoR A].

Lorsque la molécule choisie pour le contrôle de la DA est la ciclosporine, l'oclacitinib peut être utilisé de façon concomitante en début de traitement pour accélérer la diminution du prurit [SoR B] pendant la poussée. L'acéponate d'hydrocortisone peut également être associé à l'oclacitinib pour prévenir la réapparition du prurit et des lésions cutanées lors de la réduction de la fréquence d'administration de l'oclacitinib de deux à une fois par jour [SoR A].

La ciclosporine est partiellement efficace au début et pleinement efficace après quatre à six semaines de traitement [SoR A] ; elle n'est donc pas recommandée pour le traitement des poussées [SoR A].

Ces lignes directrices doivent être considérées comme une base de décision sur laquelle des approches différentes ou supplémentaires peuvent être utilisées dans certains cas et selon les préférences du propriétaire. En outre, il convient de garder à l'esprit que les propriétaires doivent pouvoir supporter le coût du traitement, en particulier dans le cas de maladies chroniques telles que la DA.

Bibliographie

1 Bruet V.; Mosca M.; Briand A.; Bourdeau P.; Pin D.; Cochet-Faivre N.; Cadiergues M.-C. Clinical Guidelines for the Use of Antipruritic Drugs in the Control of the Most Frequent Pruritic Skin Diseases in Dogs. Vet. Sci.2022, 9, 149. doi :10.3390/vetsci9040149

2 Ebell M.H.; Siwek J.; Weiss B.D.; Woolf S.H.; Susman J.; Ewigman B.; Bowman M. Strength of recommendation taxonomy (SORT): a patient-centered approach to grading evidence in the medical literature. J Am Board Fam Pract 2004, 17 , 59-67, doi:10.3122/jabfm.17.1.59.

Article paru dans La Dépêche Vétérinaire n° 1672

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